Appel à communications
Dans le cadre du programme de recherche « Styles de la critique » porté par l’Axe « Stylistique » du Centre Interdisciplinaire d’Etude des Littératures d’Aix-Marseille (CIELAM), l’Université d’Aix-Marseille organise, en partenariat avec l’Académie Giraudoux, un colloque international « Giraudoux critique, essayiste et témoin de son temps», les 4, 5 et 6 février 2016 à Aix-en-Provence
Ce colloque envisagera la question des styles de la critique littéraire de Giraudoux ; avec cet écrivain contemporain de Proust, la notion de style revêt en effet une importance tout à fait particulière, l’auteur ayant d’ailleurs souvent été stigmatisé pour sa « préciosité » qui n’est sans doute pas autre chose que l’affichage du désir d’écrire « comme dans une langue étrangère ». Ce sont donc les textes à « littérarité conditionnelle » (Genette) de Giraudoux qui seront ici envisagés. Le corpus sur lequel porteront les études sont les textes de critique littéraire bien sûr, immédiatement reconnaissables en tant que tels parce qu’ils évoquent un auteur ou des textes; mais aussi les textes de circonstances, les récits de témoignage ou de recomposition mémorielle, les reportages, les essais politiques tant il est vrai qu’ à partir du premier conflit mondial et jusqu’au suivant, l’écrivain a mis sa plume au service d’une réflexion sur le monde tel qu’il va, ainsi que, et c’est essentiel, sur la littérature qui en rend compte – que cette dernière, d’ailleurs, le revendique ou pas. À la différence des romans et du théâtre, qui ont été repris dans trois volumes de La Pléiade, ces textes n’ont pas encore été rassemblés en volume, sans doute en raison de leur caractère disparate, que l’on interrogera donc sous l’angle de la “critique littéraire”, avec le présupposé que tout texte de ce corpus, quelle que soit sa nature, parle finalement de littérature, que ce soit par l’expression de commentaires ou par l’affirmation de théories, tout se passant comme si la critique littéraire était intrinsèque à la pensée de l’écrivain. Et pour fonder en raison ce présupposé, c’est bien sûr la considération de l'aspect stylistique qui constituera un critère prépondérant. Le corpus d’étude – non limitatif et susceptible de constituer en lui-même l’un des axes de réflexion de ces journées – comportera donc les ouvrages et textes suivants, selon une cohérence reposant essentiellement sur leur nature de prose d’idées ou de témoignage: Adorable Clio, Amica America, Cinq Tentations de La Fontaine, De Pleins Pouvoirs à Sans Pouvoirs, La Française et la France, Lectures pour une ombre, Le Sport, Littérature, Messages du Continental, Or dans la nuit, Portugal, Pour une politique urbaine, Souvenirs de deux existences, Visitations.
Dans ces textes qui furent moins suscités par une « inspiration » que par le « monde réel », pour reprendre une distinction utilisée par l’auteur lui-même dans Visitations (« Le monde de l’inspiration doit être, lui aussi, comme le monde réel, chaque jour renaissant», Visitations, Grasset, 1952, p. 61-62), nous interrogerons la nature des rapports de l’écrivain au réel et les modalités de l’écriture qui exprime ce rapport. Dans ses récits de guerre par exemple, l’auteur est d’abord témoin, mais, dans la mesure où il ne renonce pas à faire œuvre d’écrivain, n’est-il pas aussi et encore “critique”? Dans les années trente, sa participation civique et critique à la vie de la nation prend la forme d’un engagement non militant mais moraliste ou humaniste, qui se voudra finalement « visionnaire ». À l’instar de Mauriac, l’écrivain revendique sa fonction de « journaliste », il se définit même comme « écrivain journaliste » dans un texte de 1934. Mais, beaucoup plus que chez Mauriac, une circulation très étroite, proche de la coalescence, se met en place entre l’œuvre spécifiquement littéraire et le restant des textes. « L’Histoire de Giraudoux était de part en part littéraire, mais dans un sens que la pensée critique a encore à élaborer, pour chacun des deux termes employés », notait Jeffrey Mehlman. C’est dire combien cette forme particulière d’engagement avant la lettre peut susciter des polémiques. La critique littéraire elle-même, telle que la pratique l’écrivain, embrasse parfois toute une vision sociale, comme dans « Charles-Louis Philippe », et peut se faire elle-même violemment polémique. Quelle place le style revêt-il, là encore, dans cette dimension polémique?
Nous nous proposons donc d’interroger ce corpus selon les perspectives suivantes :
- l’articulation des enjeux théoriques, politiques et esthétiques des textes de critique littéraire
- le style de l’écrivain et le style du critique : convergences ?
- le statut du narrateur-scripteur des récits de guerre : diariste, témoin, acteur, conscience de son siècle, poète ?
- le rapport de Giraudoux au journalisme et à l’essai
- la genèse de ces textes à la “littérarité conditionnelle” et leur recontextualisation; leur éventuelle articulation avec l’oeuvre “principale”; l’imaginaire commun aux essais et aux textes littéraires, et sa mise en forme différentielle
- le statut de l’engagement de Giraudoux; la place et l’efficacité du style dans cet engagement
- la réception de Giraudoux en tant que critique
Les propositions de communications (300 mots) ainsi qu’une brève notice bio-bibliographique sont à envoyer pour le 30 juin 2015 au plus tard à
Annick Jauer, annick.jauer@univ-amu.fr et Mireille Brémond, mireille.bremond@univ-amu.fr
Les propositions seront ensuite examinées jusqu’à la mi-juillet.
Les articles rédigés devront être remis fin février 2016 au plus tard.
Comité d’organisation
Michel BERTRAND, professeur de littérature française, CIELAM, AMU
Mireille BREMOND, maître de conférences, Laboratoire Interdisciplinaire de Droit des Médias et des Mutations Sociales, AMU, vice-présidente de l’Académie Giraudoux
Annick JAUER, MCF littérature française, CIELAM, AMU
Joël JULY, PRAG à l’Université d’Aix-Marseille, CIELAM, AIS
Lucien VICTOR, professeur émérite de langue et littérature française, CIELAM, AMU
Comité scientifique
Mauricette BERNE, Conservateur général honoraire au département des manuscrits de la B.N.F., Présidente de la Fondation Jean et Jean-Pierre Giraudoux, sous l’égide de la Fondation de France
Annie BESNARD, Université de Lorraine, secrétaire de l’Académie Giraudoux
Jacques BODY, professeur émérite de littérature française, Université François Rabelais, Tours
Stéphane CHAUDIER, maître de conférences à l’Université Jean Monnet de Saint-Etienne, CIEREC, AIS
Sylviane COYAULT, professeur de littérature française, Université Blaise Pascal, Clermont-Ferrand
Pierre D’ALMEIDA, chaire supérieure, Lycée Descartes, Tours
André JOB, chaire supérieure, CELIS, UBP, Clermont-Ferrand
Philippe JOUSSET, professeur de langue et littérature française à l’Université d’Aix-Marseille, CIELAM, AIS
Yves LANDEROUIN, professeur de littérature française, Université de Pau-Bayonne
Anne-Marie PREVOT, spécialiste de stylistique, Université de Limoges
Guy TEISSIER, Université François Rabelais, Tours