
Déconstructions de l’économie : Enjeux théoriques et perspectives interdisciplinaires
Workshop
27-28 mars 2025 - Aix-en-Provence, 29 av. Robert Schuman – Maison de la Recherche, Salle 2.44
Cette rencontre a pour objectif de construire un terrain de travail pour évaluer les différentes directions – disciplinaires, conceptuelles, méthodologiques – dans lesquelles l’articulation entre « déconstruction » et « économie » peut conduire à des développements féconds. Ceci répond à une double exigence : mettre en évidence des enjeux théoriques et pratiques dans le domaine des sciences économiques qui permettent une ouverture de la déconstruction dans cette direction, et mettre en évidence les éléments conceptuels et pragmatiques de cette perspective philosophique susceptible d’intéresser et d’infléchir une réflexion économique.
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La référence à la terminologie de l’économie est un trait massif et déterminant de l’approche philosophique de la déconstruction. La marque de fabrique de l’œuvre de Jacques Derrida, la « différance », a pu être définie par celui-ci comme « le concept de l’économie » (Positions, 1972). La déconstruction est une tentative pour décrire une structure de la réalité se fondant sur un postulat de non-conservation de tout principe (qu’il s’agisse de l’énergie, de la valeur, de la vie, ou du sens) : cette pensée comporte dès lors une critique de toute loi (nomos) de la propriété et de la proximité (oikos). Des métaphores et des notions économiques déterminent la théorisation déconstructive de la perception, de la signification, de l’épistémologie, de l’éthique et du politique, ainsi que de la structure même de l’expérience. Dans De la grammatologie (1967), cette généralité conceptuelle est liée, d’un point de vue empirique, à la connexion historique entre l’essor de l’écriture et celui d’une « économie monétaire et pré-monétaire ». La prise en compte du rapport entre don, échange et monnaie structurera par la suite toute réflexion déconstructive sur l’éthique, le politique, et notamment le droit (en particulier, en ce qui concerne la problématique de l’hospitalité), sous la forme d’une dialectique ouverte entre le calculable et l’incalculable, la négociation et l’inconditionnel.
Pourtant, cette pensée n’a pratiquement jamais interrogé le domaine de l’économie : ni les phénomènes économiques, ni les textes des économistes, ni les documents scandant l’histoire économique. Jacques Derrida lui-même a signé un seul article dédié à l’argent, et participé à une table ronde sur ce thème, publiée. La littérature secondaire est également très limitée à ce sujet.
Il s’agit d’interroger cette articulation et ses implications dans les débats économiques contemporains, tout en investissant le contexte interdisciplinaire dans lequel cette problématique s’inscrit.
Dans ce cadre, si par une pensée de la déconstruction on dénotera en particulier l’œuvre de Jacques Derrida, par le domaine de l’économie on dénotera à la fois a) les phénomènes économiques (le monde de la production, de l’échange et de la consommation) ; b) les sciences économiques (economics) et l’histoire de la pensée économique ; c) la conceptualité et la rhétorique de l’économie, à l’intérieur de différents champs théoriques et pratiques (philosophie, littérature, psychanalyse, droit, sciences du vivant, sociologie, organologie, science économiqu, etc.).
À lui tout seul, le traitement du terme « économie » dans le contexte de la « déconstruction » est digne d’intérêt. Plus que ça : la déconstruction se déploie peut-être, comme telle, comme une entreprise économique – et non pas nomique, sinon « hyperjuridique » (Du droit à la philosophie, 1990, p. 96). À ce niveau de généralité, néanmoins, le traitement du rapport entre ces termes se borne trop souvent à constater l’interrelation entre une économie restreinte (de la calculabilité) et une économie générale (de l’incalculable), d’après la distinction de G. Bataille.
Ce travail a bénéficié d’un financement du programme de recherche et innovation Horizon 2020 de l’Union Européenne, dans le cadre du Grant Agreement Marie Skłodowska-Curie No 101034324, et d’une aide du gouvernement français au titre de France 2030, dans le cadre de l’Initiative d’Excellence d’Aix-Marseille Université –A*MIDEX, ref. AMX-22-COF-412
Programme
Jeudi 27 mars
14h Accueil des participants et ouverture des travaux
Giustino De Michele et Francesca Manzari (CIELAM, AMU)
14h30-16h 1ère session
Stéphane Lojkine (CIELAM, AMU) - Economimésis du port-franc : dispositif spectral et anarcho-capitalisme
Elias Jabre (LLCP, Paris 8) - De la lutte des classe à la guerre des noms : du (non-) recoupement entre intérêt économique de classe et investissement libidinal de race
Discussion
16h Pause
16h30-18h30 2ème session
Feriel Kandil (AMSE, AMU) - Déconstruction ricœurienne : le don et l’échange
Gabriel Rezende (UF Minas Gerais)
Donner la contrainte
Fausto Fraisopi (CGGG, IMERA AMU/ Freiburg im Breisgau) - Complexité de l’économie et déconstruction des approches linéaires
Discussion
19h30 Dîner
Vendredi 28 mars
12h30 Déjeuner
14h30-16h 3ème session
Giustino De Michele (CIELAM, AMU) - Déconstruction comme pensée économique ?
Antonella Corsani (IDHES, Paris 1) - L’énigme du travail
Discussion
16h Pause
16h30-18h 4ème session
Guillaume Quiquerez (LEST, AMU) - Les principes de la Responsabilité Publique des Entreprises : une reconstruction à partir de John Dewey
Stéphane Luchini et Miriam Teschl (AMSE, AMU) - Repenser l’effort : l’histoire de la pensée et les neurosciences pour éclairer un concept économique
Discussion
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