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Auteurs & Autrices :
  • July Joël
Mots-clés :
  • Chanson -chanson française
  • Reprise
  • Réécriture
  • Version

Résumé :

S'il y eut une époque plus favorable que les autres, autour des années 60, où la chanson française (et derrière elle toute la chanson européenne) prit appui sur les modèles anglo-saxons qu'elle traduisait, parfois maladroitement, dans des covers, pour imposer en France un modèle musical et culturel et pour fonder à grande échelle l'industrie discographique, nous vivons depuis le début du XXIe siècle une période où ce qui se pratique de manière intensive, c'est la reprise des chansons du répertoire en langue française, celui qui va largement des années 40 aux années 90 ; plusieurs événements président dans le courant des années 90 et au début des années 2000 à l'émergence de cette mode : stratégie des labels qui veulent renflouer les caisses après la baisse des ventes physiques consécutives aux téléchargements plus ou moins illégaux et qui imaginent donc récupérer une clientèle en assurant la promotion de succès d'autrefois ou de vedettes vieillissantes, (ré-)apparition de télé-crochets très en vogue qui nécessitent structurellement de proposer aux postulants des chansons du répertoire à réinterpréter, besoin des oeuvres caritatives de constituer des spectacles festifs et des albums collaboratifs, besoin des nouvelles générations de se regrouper autour de duos ou featurings, tendance louable de la chanson française actuelle à se constituer comme réservoir culturel qui se suffit à lui-même... Toutes ces situations bien établies proposent au public un phénomène général que l'on couvre de termes à peu près synonymes (version, reprise, adaptation, réadaptation, réinterprétation, interprétation) sans qu'il soit besoin pour les auditeurs de les distinguer entre eux puisque si le phénomène se ramifie en exercices divers, on n'en perçoit jamais que le point commun : celui d'une chanson déjà connue de l'auditeur entendue in extenso sous une forme différente. Cette approximation lexicale ne retiendra notre attention que pour établir des constantes tangibles et les juger utiles pour délimiter notre propos : celle d'une part d'un réemploi conscient de la chanson source de sorte que le récepteur, pour peu qu'il ait plusieurs fois entendu la création originale, ne sera pas surpris, mis en difficulté, inquiété par ce doublon (contrairement au malaise dans lequel nous plonge souvent l'intertextualité, cette impression d'avoir « déjà entendu ça quelque part » sans pouvoir en identifier l'origine) ; celle d'autre part d'un réemploi massif de la chanson source au point que l'auditeur n'aura pas l'impression qu'une partie indispensable de la structure initiale a été laissée de côté et manque.

Type de document : Book section