Résumé :
En 1685, la révocation de l’Ėdit de Nantes conduit brutalement les Réformés à faire le choix de la conversion ou du départ1. Ce choix s’opère-t-il à l’échelle de la conscience individuelle ou à l’échelle des familles ? Constitue-t-il une rupture irréversible, ou bien la communauté réformée entretient-elle des stratégies de résistance et l’espoir d’un retour ? À Nyons, où la communauté réformée est puissante, mais aussi en bonne entente avec les catholiques, l’onde de choc de la révocation n’est pas plus douce pour autant. Certes, la ville a connu les premiers « pactes d’amitié » des guerres de Religion ; elle a toujours cherché à maintenir la parité confessionnelle dans la représentation municipale2 ; et face à l’Ėdit de Fontainebleau la ville tente un temps de maintenir la parité au consulat, en accord avec l’intendant, pour les « nouveaux convertis de bonne foi » 3. Mais rapidement la révocation de l’Ėdit de Nantes divise la cité jusque dans l’intimité des familles4. Les papiers de deux familles alliées, les Brachet et les Lafont, et tout particulièrement les journaux personnels en apparence antagonistes de deux femmes, Isabeau d’Armand de Lus et Marguerite de Durand, montrent à quel point la révocation a déchiré les familles, mais aussi quelles stratégies complexes elle a conduit à organiser pour tenter de pérenniser, souvent en vain, leur lignage et leur foi