- Littérature
- Littérature africaine
- Littérature francophone
- Génocide
- Jugement éthique
- Narratologie
- Lecture actualisante
Résumé :
Le mensonge est placé au cœur de la structure narrative du Cavalier et son ombre, du Sénégalais Boubacar Boris Diop, et de L’Aîné des orphelins, du Guinéen Tierno Monenembo, deux romans consacrés, partiellement pour le premier et principalement pour le second, au génocide. Cet apparent paradoxe permet finalement de révéler la fonction heuristique de la fiction, car cette dernière fait ainsi appel à un régime particulier de lecture, sollicitant le lecteur de manière à ce que, comme le dit le philosophe Paul Ricœur, il y réponde et en réponde. Différemment du récit historique, la fiction narrative est en effet apte à rendre compte de la dislocation du temps, de la conscience et de l’ordre du monde qui suit la catastrophe. Les dispositifs énonciatifs propres à chacun des deux romans manifestent en outre comment l’évènement, restant toujours indicible, porte atteinte à l’ordre-même du symbolique, nécessitant dès lors ce qu’Abdourahman A. Waberi a appelé la « mise en procès des pouvoirs du langage ». C’est pourquoi le recours à des narrateurs indignes de confiance renvoie enfin à la responsabilité d’un lecteur universel, que chaque récit institue comme témoin.