Compte rendu dans Perspectives médiévales
Si l’homme médiéval chemine beaucoup, le voyage, long et périlleux déplacement, ne concerne que quelques catégories sociales dont le chevalier fait partie – courir les routes trempe l’âme guerrière et forge une réputation. Le pèlerin quant à lui se met en marche vers les lieux saints européens ou orientaux, à la recherche du sacré. Raoul de Houdenc, auteur méconnu du début du xiiie siècle, a transposé ces réalités historiques et sociales dans ses récits et a fait des figures familières du pèlerin et du chevalier les pierres angulaires de son œuvre. Quatre écrits en vers, rédigés sur une trentaine d’années, et à première vue disparates : un bref dit allégorique, un essai didactique intitulé Le Roman des Eles, un pèlerinage onirique au cœur du monde infernal avec Le Songe d’Enfer, et un roman d’aventures arthurien, Meraugis de Portlesguez.
Le personnage houdanesque est une figure en marche : du chevalier composé de vertus qui s’élance vers le ciel au pèlerin-rêveur s’enfonçant dans l’au-delà diabolique, Raoul de Houdenc nous offre une vision surprenante de deux types littéraires qu’il réinvente avec humour et subtilité. La pensée et la visée de l’auteur progressent au rythme de ses personnages, et sous la fable et le comique des situations, il propose une réflexion sur son époque et ses contemporains, ainsi qu’une philosophie de l’amour, de l’honneur chevaleresque et de la foi.