Continuer, publié en 2016, questionne les limites de la représentation en accordant une place prépondérante au regard. Il s’agit, tout d’abord, de celui que les personnages posent sur leurs proches. Ce « pas de côté » permet de réintroduire du jeu dans leur relation, comme on le dit d’une mécanique, rendant possible un véritable changement de point de vue. Mais le roman donne également matière à réfléchir sur la difficulté qu’il y a, plus largement, à appréhender le monde qui nous entoure. Si les personnages recourent parfois à des lieux communs pour définir leur environnement, ce dernier se révèle souvent plus trouble et plus étrange qu’il n’y paraît au premier abord. Sans pour autant adopter une approche ouvertement symboliste, Laurent Mauvignier suggère – et le prénom de son héroïne, Sibylle, en est un indice – que la vie qui nous anime et qui nous englobe est parcourue de forces inconscientes ou occultes que l’on ne peut totalement domestiquer.