DOSSIER : La théorie littéraire en questionS
Introduction : « État des lieux de la théorie littéraire. Définitions, histoire, enjeux »
Inventory of literary Theory. Definitions, history, issues.
En 1998 dans Le démon de la théorie Antoine Compagnon opposait toutes les tentatives de « théoriser » la production littéraire au « sens commun ». Le point aveugle de sa critique était bien ce « sens commun » qu’il déclinait en « auteur », « œuvre », « style » …sans dire précisément qui partageait ce « sens » – lecteurs cultivés, grand public, journalistes, spécialistes… ? – Car rien n’est plus « commun » que l’expérience de la lecture littéraire (ou qualifiée de telle) et rien ne l’est moins selon les choix de lecture, la position socio-culturelle, l’époque, la société, la langue… La notion d’auteur par exemple, telle que nous l’entendons communément, n’est universelle ni dans le temps ni dans l’espace sans qu’il soit besoin d’évoquer la « mort de l’auteur » (en tant que « sujet ») discutée dans les années 1960-70 sur les pas de Michel Foucault et de Roland Barthes1. Gisèle Sapiro dans son présent article précise combien ces notions d’auteur et d’œuvre sont des « constructions sociales inscrites dans l’autonomisation des champs de production culturelle ». Car il faut considérer autour du phénomène de la création littéraire différents niveaux d’analyse et de réception (amateurs vs professionnels) et des acteurs ou des intervenants en complémentarité et non en opposition (voir Hélène Merlin Kajman). Cette création, plus encore peut-être que d’autres, se situe au carrefour de plusieurs discours et de plusieurs pratiques, de la consommation grand public et de la fabrication des best-sellers à la recherche scientifique.
Lire la suite : https://doi.org/10.4000/hrc.5315