Confrontées à l’effondrement des grands modèles idéologiques de la deuxième moitié du XXe siècle et à une mondialisation qui ébranle leurs assises sociales et leurs références culturelles nationales et linguistiques, les sciences humaines semblent s’être réfugiées depuis une vingtaine d’années dans une investigation essentiellement quantitative et descriptive.
Parallèlement à ce recul théorique, qui fragmente et isole les champs disciplinaires, la logique du corpus, toujours plus étendu grâce aux nouvelles technologies d’archivage, de diffusion et d’exploitation des données, crée une demande de plus en plus pressante d’interdisciplinarité. Pour analyser son corpus, le chercheur recourt à un vocabulaire scientifique qui désormais s’inscrit dans une histoire mondialisée des sciences humaines. Les notions qui surgissent, au niveau mondial, dans son champ disciplinaire ont souvent un passé européen, et même plus précisément franco-allemand. Elles ont été sorties de leur contexte d’origine, adaptées à un autre contexte culturel, social, idéologique.