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Résumé

Fabienne Kanor, qui se présente comme une auteure « déterritorialisée », explore dans son œuvre la thématique des circulations et des déplacements. Elle y est envisagée à partir des migrations contemporaines des Suds vers le Nord, des voyages, mais aussi de la déportation des Subsahariens durant la traite transatlantique. Ainsi, l’auteure rassemble dans ses productions divers espaces-temps, mais aussi différentes cultures (des Antilles, d’Afrique et d’Europe) qui ont en partage l’afrodescendance. En cela, son œuvre englobe des appartenances multiples et témoigne d’un monde où les frontières identitaires, géographiques et culturelles sont reconfigurées à travers les mobilités qui s’y produisent.

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Introduction

Fabienne Kanor est née en 1970 à Orléans. Ses deux parents, qui sont martiniquais, sont arrivés en France dans les années 1960, durant la vague d’émigration organisée par le BUMIDOM. Très tôt, l'imagination et la création se sont imposées à elle comme un moyen d’oublier son exclusion et d'échapper à « l’immobilité1 » de sa vie quotidienne. D'abord journaliste, puis romancière et cinéaste, Fabienne Kanor se définit aujourd’hui comme une « écrivance2 ». Aussi, la création lui apparaît comme un moyen de se créer ses propres lieux d'appartenance : 

Finalement c’est toujours une histoire de place. Où est ma place ? C’est la question de la déterritorialisation, où l’on est à côté de soi-même. Cette histoire-là, j’essaie de la décliner à travers l’histoire du migrant. C’est parce que moi-même je ne me suis jamais sentie à ma place que cela m’a amené à parcourir tous ces territoires, à marcher le monde. Aujourd’hui à Yaoundé, demain à Rabat, puis à Paris, à Fort-de-France, à la Nouvelle-Orléans… C’est ainsi que je porte tous ces mondes en moi, et leurs fardeaux aussi. Je suis en quelque sorte condamnée à écrire des histoires de déplacement. Je suis dans une lignée d’écrivains voyageurs [...]. Et je vais continuer à marcher3.

Nous envisageons cette « marche » comme le fondement de son œuvre. Si elle est indéniablement ancrée dans ses processus de création, elle constitue également une matière thématique récurrente dans ses productions. Les circulations historiques et plus particulièrement la « Déportation transatlantique des Subsahariens4 » (Humus5 ; « Martinique, une terre d'hommes cassés »6) y croisent les migrations contemporaines des Suds vers le Nord, notamment de l’Afrique vers l’Europe (Faire l'aventure7; Des pieds, mon pied8) et des Antilles vers la métropole (D’eaux douces9 ; Jambé Dlo10). Ses personnages sont toujours mobiles, sinon des voyageurs (Je ne suis pas un homme qui pleure11 ; Anticorps12; Les chiens ne font pas des chats13).À travers ses créations, dans lesquelles la fiction croise la réalité et dans lesquelles les différents supports de création dialoguent, l'auteure investit les continents africain, américain et européen et tisse l’espace de culture commune qu’ont en partage les Afrodescendants ; celui-ci s'étend aux alentours de ce que Paul Gilroy nomme « l'Atlantique noir14 ». C'est à cet espace afrodiasporique que l'auteure se sent appartenir, bien plus qu'à son île d'origine ; ainsi, elle englobe les Antilles dans une expérience transcontinentale. En affirmant que son unique communauté, « ce sont [ses] personnages15 », Fabienne Kanor appréhende véritablement la création comme un moyen de reconfigurer les espaces existants à travers les circulations qui s'y produisent, ce que cet article se propose de démontrer. C'est effectivement en abolissant les frontières entre l'histoire et la contemporanéité, entre le récit individuel et l'expérience collective, entre différents espaces et entre différentes cultures, que Fabienne Kanor dessine à travers son œuvre les contours d'un « tiers-espace16 » culturel, dans lequel ses appartenances multiples se rencontrent et s'entremêlent. Et c'est là, au cœur même de sa création, qu'elle trouve sa place véritable.

Circulations temporelles

L’histoire en héritage

Dans un entretien17, Fabienne Kanor explique que la « trace » est un élément qui guide son écriture. Cette trace remonte à l'origine de sa filiation, à savoir l'Afrique ancestrale et la « déterritorialisation18 » initiale qu’a constituée la Déportation transatlantique des Subsahariens. Le roman Humus est à ce titre évocateur, puisqu'il s'inspire d'un fait historique datant de 1774 : quatorze femmes africaines sautèrent d’un navire esclavagiste, Le Soleil, qui était en route vers Saint-Domingue. Si le journal de bord du capitaine – qui est conservé aux archives de Nantes – s’en tient à la simple anecdote historique, Fabienne Kanor s’en saisit pour y inscrire la fiction :

Il faut voir dans ce saut […] un prétexte, le texte qui précède le roman à venir. C'est parce que ces femmes ont sauté que le capitaine Mosnier prend la plume et que le récit peut commencer. Elles sautent non pas parce qu'elles n'ont rien à dire, mais bien parce qu'elles ont besoin de raconter ce qui s'est passé. Et je me sers, moi, de ce saut pour plonger dans le récit, pour le clore comme pour le relancer19.

L'auteure prend alors le rôle d'une dépositaire de l'histoire, tout en s'accommodant des espaces vides qui la sillonnent, ceux-ci lui permettant une véritable liberté dans sa création, puisqu’au « au commencement était l'absence20 ». Le récit des héroïnes du roman participe d’une volonté de recentrer l'expérience de la Déportation transatlantique sur la parole subsaharienne et afrodescendante, Léonora Miano affirmant en effet que « l'impératif est […] de re-territorialiser la vision, le langage21 ». En racontant la tragédie esclavagiste à partir du vécu de ses victimes, il leur réattribue une identité en les ressuscitant, parce que comme l’écrit Patrick Chamoiseau, « aller avec l’écriture dans cette mort de l’esclavage c’est y aller avec la vie, car toute écriture est d’abord vie22 ». Le roman résonne ainsi d’une certaine oralité : chaque chapitre est consacré à l’histoire de l’une de ces femmes, qui s’y expriment à la première personne et à partir d’un présent d’énonciation. Il produit finalement un assemblage de témoignages, racontant tour à tour la capture, la traversée ou l’arrivée aux Antilles.

Inscription dans le présent

Le présent employé par les héroïnes du roman se confond avec celui à travers lequel s’exprime L’Héritière, personnage contemporain dont la voix correspond en réalité à celle de l'auteure. Apparaissant en ouverture puis en clôture du roman, ses interventions y instaurent une forme cyclique, englobant le passé dans le présent. Elle y exprime les difficultés et les douleurs rencontrées lors de la confrontation à la tragédie transatlantique et interroge son inscription dans cette histoire, ce sur quoi Fabienne Kanor se questionne par ailleurs : « Qui étais-je vraiment ? Qu’avais-je été autrefois ? Par quel miracle avais-je survécu ?23 ». L'exploration de l’histoire fonctionne finalement comme une manière de se rencontrer soi-même, ainsi que l’affirme Léonora Miano :

Les mondes oubliés, tels que je les comprends dans ce contexte, ne sont pas effacés, mais silencieux. Ils sont la mémoire souterraine des êtres et des peuples. Les vivants du présent sont des figures palimpsestes, auxquelles l'obligation est faite de retourner en elles-mêmes pour décrypter la complexité qui les constitue. Le besoin de se confronter au visage des ancêtres, de retrouver leurs individualités, n'est pas une célébration du passé, mais un mouvement vers soi-même24.

Aussi, le passé dialogue avec le présent dans les œuvres de Fabienne Kanor, ce qui est souligné par les structures en analepses et prolepses qui régissent la plupart de ses romans, mais aussi par l’intervention de personnages du passé dans les parcours des personnages contemporains. Dans Faire l’aventure, Biram, un jeune Sénégalais qui souhaite partir en Europe, a l’habitude de se réfugier dans une ancienne esclaverie qui est hantée par des fantômes : 

Des tuiles grincèrent du côté de la toiture. […] Nés trois siècles plus tôt et morts de la mort la plus naturelle qui soit pour un nègre (pendaison, scorbut, coups de fouets ou de pétoire), ces anciens esclaves s'entêtaient donc depuis à remonter sur le toit, gardiens siphonnés de l'histoire25.

Or, il s’agit en quelque sorte d’un lieu instigateur du parcours du personnage, du point de départ vers un autre monde, une autre rive, comme il le fut aussi pour les esclaves qui y furent parqués. En effet, c’est à cet endroit que le personnage contemple sans cesse l’océan et se laisse aller à ses rêves de voyages, de richesse et d’amour ; c’est aussi là qu’il passera sa dernière nuit avant d’embarquer sur un bateau de fortune pour se rendre en Europe, puisqu’il ne peut traverser les frontières légalement. Ainsi, l’histoire apparaît comme un élément déterminant dans la condition contemporaine des Afrodescendants, et selon Nathalie Etoke, ce n’est qu’en acceptant celle-ci qu’ils pourront un jour s’en libérer : 

Un ensemble de circonstances oppressives ont castré le destin du Subsaharien et de l’Afrodescendant. Elles ont sans aucun doute donné naissance à une condition noire. En revanche, il appartient à l’individu, comme modalité du possible, d’inventer la liberté. Celle-ci ne peut s’exprimer véritablement qu’à partir du moment où elle est en péril. Au lieu de voir notre condition sous le principe de l’enfermement, de la malédiction et de l’insurmontable, pourquoi ne pas reconnaître avec humilité ou honnêteté qu’elle est depuis quelques siècles le terrain sur lequel se bâtit notre avenir26 ?

C’est en rejoignant cette conception de l’histoire que Fabienne Kanor raconte les circulations, celles-ci pouvant justement être envisagées comme « modalités du possible » : l’entremêlement du passé et du présent affirme par ailleurs le socle que constitue l’histoire pour les personnages contemporains. Tout cela rejoint ce que le peuple Akan nomme le Sankofa : métaphorisé par un oiseau qui vole en tournant la tête en arrière et en tenant dans son bec un œuf, ce concept symbolise la nécessité de se nourrir de l’histoire pour construire des lendemains meilleurs.

Hérédité familiale et hérédité historique

Or, cette négociation est particulièrement difficile pour les personnages d’origine antillaise, ceux-ci subissant, en plus de la « déterritorialisation » initiale, une seconde désappartenance, qui les sépare de l’île d’où viennent leurs parents. Nés et ayant grandi en métropole, ils sont enfants d’immigrés antillais, ceux-ci subissant en France les conséquences directes de l’esclavage, à savoir le racisme et l’assimilation forcée. Aussi la peur et la méfiance sont des sentiments qui animent les personnages parce que leurs parents les leur ont transmis ; comme pour ceux de Fabienne Kanor, « ne pas se faire remarquer était le mot d’ordre. Ils répétaient : “Ce pays n’est pas pour vous.”27 ». L’histoire individuelle de la migration, tout comme par ailleurs l’histoire collective de l’esclavage, n’est donc pas assumée par les parents. Ainsi, Frida, a grandi auprès d’un père silencieux et/ ou absent, d’une mère froide et autoritaire qui figure la femme potomitan28 et dans une famille « avec […] une mémoire en consigne29 ». Elle se demande alors :

« Pourquoi se sont-ils tus ? Terrés dans leurs barres d’ivoire, à l’ombre, dans leur HLM. J’ai si mal, oh ! si mal ! »
Les larmes dévalent les pentes du visage.
« Connaissez-vous, chers parents, la nature du châtiment réservé aux fugitifs ? »
Fleur de lys. Jarret coupé. Mort. Peau brûlée. Corps mutilé. Massacré. Cuisiné.
« Croyez-vous qu’il puisse y avoir prescription des siècles après tout ce bordel ? »
Des gouttes tombent du ciel. Il ne pleut pas, c’est le temps perdu qui s’écoule. Des années à faire l’impasse sur tout, à s’inventer une manière commode de vivre ensemble30.

Ainsi, la problématique de l’hérédité historique se confond avec celle de l’hérédité familiale, toutes deux étant très explorées dans l’œuvre de Fabienne Kanor. Celles-ci se rejoignent à travers les non-dits qui les entourent, la dispersion, les ruptures et les conflits qui les caractérisent. Parce qu’elles ne sont pas « résolues », elles introduisent aussi des failles dans les rapports de Frida à l’altérité, et contaminent ses rapports intimes, amoureux et sexuels.

Circulations spatiales

Le motif de l’enfermement

Le corps est en effet appréhendé comme « le lieu qui dit l’histoire31 » : il porte les traces du passé et continue, même chez les personnages de l’époque contemporaine, d’être marqué par les cicatrices de la pensée coloniale. Les espaces corporels, de même que les espaces mentaux, sont alors appréhendés comme des lieux clos. Ils érigent des barrières entre le monde et le lecteur, qui « comme ces ombres jadis enchaînées », « est dès lors condamné à ne plus bouger. Juste écouter, sans autre distraction [...] entendre encore, jusqu’au bout, au risque de s’étourdir [...]32 ». Aussi, l’écriture de Fabienne Kanor le confronte, voire l’enferme dans les consciences des personnages, celles-ci étant teintées de cynisme, de désillusion, de violence et quelques fois de folie, comme dans le roman Anticorps. Mais ils dressent également des barrières entre les personnages et le monde : Biram, héros du roman Faire l’aventure, est enfermé dans sa condition de migrant clandestin, ce qui le relègue tant à la marge des espaces urbains que de la société, ainsi qu’en témoigne la description qu’il fait d’un centre de rétention, où les corps se fondent dans l’espace :

Biram n’avait jamais vu un tel grouillis d’hommes, un tel sens-dessus-dessous de nationalités parquées dans des préfabriqués aux odeurs de chierie et à taille de placards. On les appelait dortoirs. Et il est vrai qu’on y dormait mieux qu’à l’extérieur, cette cour asphaltée ou s’entassaient invariablement, quel que soit le temps, les matelas mousse et les nattes des nouveaux arrivants. Un foutoir, sincèrement, où il fallait batailler pour ne pas se faire piquer son pain au réfectoire, son savon sous la douche, sa place dans la longue file des latrines33.

Les personnages du roman Les Chiens ne font pas des chats sont, quant à eux, séparés par les différences des classes sociales auxquelles ils appartiennent ; d’une manière générale, la couleur de peau des Afrodescendants jette sur eux un « voile noir34 » marqué de nombreux stéréotypes racistes ; chez les femmes tout particulièrement, ceux-ci croisent la question du genre, et l’intersectionnalité35 de leurs oppressions remontent à l’histoire de l’esclavage. C’est donc aussi dans ces espaces corporels et mentaux que se produit la rencontre entre le présent et le passé, projetant l’amour que Frida ressent pour son amant Éric dans la violence héritée de l’histoire :

Éric, Rico, Yéric, au plus bas des cieux, au plus près de ma chair. Il me caresse, là, à l’embouchure des cuisses […] Éric, homme marron glacé, vu quelques parts entre l’Afrique et les Antilles. Croisé sur le pont à l’heure du grand bain, rare moment où ils nous font sortir.
Ce matin, on est venu me chercher plus tôt que d’habitude. C’est un Blanc aux cheveux roux qui est descendu dans les cales. Même qu’il m’a souri, l’homme, qu’il a eu l’air content de me voir, qu’il riait aux éclats lorsqu’il m’a retiré mes chaînes […] Je crois bien que c’était la première fois que j’entendais le mot « négresse ». La première fois aussi qu’on entrait dans ma chair, m’éclaboussait de sperme, me mettait à l’envers, à l’endroit, sur les côtés. […] La honte. Dissimuler mon corps violé. Mes tétons meurtris. Mes fesses mouillées. La peur. Redescendre dans les cales, reprendre ma place comme si de rien n’était, comme si Éric n’y était plus36.

La découverte de la sexualité suit la trajectoire brutale de la traversée de l’Atlantique vécue par l’aïeule37 de Frida. Ainsi, le suicide final apparaît sans doute comme un geste ultime pour se débarrasser de l’histoire douloureuse que le corps conserve, à savoir l’enfermement dans la cale, que Fabienne Kanor appréhende, comme Glissant, tel un « lieu majeur, originel, de fermentation, de transformation, [...] ». En effet, selon elle, « la cale, c’est ce ventre bourré à craquer, de morts-vivants. La traversée, c’est le passage de la vie à la mort puis à la survie [...] ». Elle dit enfin qu’en tant que romancière elle a « besoin de ce lieu clos où tout est possible, où rien n’est encore arrêté38 ».

Écriture de la frontière

Or, ce lieu où « rien n’est encore arrêté », ce pourrait être la frontière, car comme l’écrit Homi K. Bhabha, « la frontière devient l’endroit à partir duquel quelque chose commence à être dans un mouvement comparable à l’articulation ambulante et ambivalente de l’au-delà39 ». C’est ainsi que l’on peut l’envisager dans le roman Faire l’aventure, puisqu’elle y apparaît dès l’ouverture du roman : « Rien ne disait la frontière, sauf le gosse. Ce sursaut des lèvres du garçon lorsque, dérivant vers le large, son regard butait contre la ligne bizarrement solide de l’eau40 ». C’est donc cette même frontière qui impulse le récit et le désir d’aventure du personnage, et c’est aussi dans cette frontière que le personnage s’inscrira dans la suite du roman. En effet, dans ce récit comme dans la plupart des œuvres de Fabienne Kanor, les espaces racontés sont quasiment toujours des espaces frontaliers : villes portuaires (Mbour, Rome dans Faire l’aventure), archipels (Tenerife, Lampeduse dans Faire l’aventure ; les Antilles dans D’eaux douces ainsi que dans les reportages radio enregistrés pour France culture), espaces maritimes (L’Atlantique dans Humus ; la Méditerranée dans Faire l’aventure) ... Si ces lieux constituent des espaces stratégiques dans ces créations, c’est parce qu’ils sont certes des frontières géographiques, mais aussi culturelles et économiques. En effet, de part et d’autre de celles-ci, se trouvent le Nord et le Sud, « cette passerelle, actuellement étroite, si minée41 » ; si « minée », parce qu'elle sépare les pays développés des pays en voie de développement, l'ancien colon de l'ancien colonisé, les États occidentaux et impérialistes de ceux qui en furent victimes. Le tourisme de masse, présent par exemple dans les îles Canaries, est dénoncé sous le regard acerbe de Biram. Vendeur à la sauvette, il méprise ces « criquets, qui ne se baladaient jamais sans leur banane deux compartiments à la taille, leur plan gratuit du quartier à la main et leur short en lin trop mou sur les fesses » et « qui se prenaient pour les rois du monde42 ». Cette frontière institue ainsi « un malaise » et possède alors un versant que l’anthropologue Michel Agier détermine comme étant « liminal43 ». Mais Fabienne Kanor parle aussi de « passerelle », parce que sans cesse les frontières sont traversées par des individus, des biens et des idées. Elles constituent alors un lieu de rencontre entre les cultures qui se situent des différents côtés de ses rives et ont donc aussi un versant « liminaire44 ». Celui-ci désigne leur position de « seuil » et « d’entre deux » et transforme les frontières en espaces de passage. 

Un espace de passage

Ce passage s’institue tout d’abord entre les espaces réels et les espaces littéraires. Fabienne Kanor est en effet une « écrivaine voyageuse », parce qu'elle circule à travers le monde, mais aussi parce que ses expériences de terres nouvelles lui permettent « de ramener la matière ». Or, cette matière, « c’est [...] d’abord une image45 » et c’est pourquoi ses créations littéraires et artistiques se caractérisent par une importante dimension descriptive. Ainsi, la plupart des lieux racontés dans ses romans ont été visités par l'auteure. Avant d'écrire Humus, elle s’est rendue au Bénin, au Nigeria et au Ghana, là « où l'esclavage a fortement imprégné les paysages46 ». Dans le dernier chapitre du roman, dans lequel s’exprime la voix de l’auteure à travers celle de L’Héritière, elle raconte son inscription dans ces espaces marqués par le passé, où elle a « marché, jusqu'à ce que le vent efface [ses] pas, l'ombre des cales dans [ses] yeux secs47 ». Sa démarche littéraire est ainsi accompagnée d'une enquête de terrain et d’une nécessité de fouler la terre habitée par celles et ceux dont elle imagine l’histoire. Aussi, pour écrire Faire l'aventure, elle a passé plusieurs mois dans des régions d’Europe du Sud. Elle y a partagé le quotidien de migrants clandestins qu’elle y a rencontrés, avec la volonté de « ne [...] pas rester à l’extérieur des flux migratoires » et « d'être dans ces lieux48 ». Les expériences des espaces existants sont nécessaires à son écriture et à son inspiration, et ces mêmes expériences, tout comme leur retranscription artistique, recartographient le monde à la mesure des circulations qui s’y produisent et au-delà des frontières qui le sillonnent :

Biram ressassait ses souvenirs. En dix ans d’aventure, il avait croisé un milliard d’humains, serré dix millions de mains, entendu x langues, x accents. Dans chaque bled où il avait séjourné, il s’était fait des copains, des ennemis et des femmes. [...] Il avait marché comme un fou entre Inhalid et Tamanrasset. Il avait eu chaud et soif dans le désert de Libye. Il avait pris des mers, tourné dans des villes, traversé des gares et des frontières. Il était monté dans des camions. [...] Ce n’était plus jamais Mbour qui revenait lorsque son esprit vaguait. Ses histoires se déroulaient désormais à Tenerife, Kita, Bamako, Naples, Almeria, Madrid, Tripoli, Gao, Djamet, Kidal, Niamey, Tinzaouatine49.

Les espaces traversés sont alors envisagés comme des lieux d’apprentissage et des passages qui projettent le personnage dans le monde ; la migration est en effet apparue à Biram comme le seul moyen lui permettant d’échapper à la monotonie de son quotidien et de décider de son propre avenir. Si elle n’apparaît pas réellement comme un besoin vital, elle répond à ses rêves d’adolescent, qui attisent sa curiosité de l’Occident ; elle est donc fondamentalement une « aventure » à vivre. Aussi, si les migrations contemporaines, les voyages et la Déportation transatlantique des Subsahariens sont racontés ensemble, c’est parce qu’ils sont tous envisagés à partir des expériences de déplacement qu’ils produisent, ainsi qu'en témoigne cet extrait d'Humus :

J’ai enjambé les rivières, erré sous des cieux bavards, vu tomber la lune et monter la pluie. J'ai dormi au-dedans des savanes, défait sommeil dans des sylves aux arbres plus grands que les ombres des arbres. J'ai tété au sein des mangues, me suis nourrie de grenades, de bananes, de noix, comme tombés du ciel jusque dans ma main […]. Le cœur en paix, le corps fourbu au terme de cette longue marche. Que m'importe de savoir où je suis, Ouest, Est, près, loin…Je suis là, seule encore pour quelques heures avant de reprendre le chemin des fers50.

Un autre personnage du roman, La Muette, qui a perdu la voix lorsqu’elle fut capturée dans sa terre d’origine, retrouve la parole au fur et à mesure de la traversée de l’Atlantique et finit par se rebaptiser « celle-qui-marche-le-monde », parce qu’une fois arrivée aux Antilles, elle dit être « celle qui vient de loin, n’habite plus mais passe51 ». Parce qu’ils traversent des espaces frontaliers, entre-deux entre le pays d’origine et le territoire d’arrivée, mais aussi entre le passé et l’avenir, le monde connu et le monde inconnu, les personnages sont forcés de se redéfinir autrement au monde. Ces lieux instituent donc des transformations identitaires et plus largement culturelles.

Circulations culturelles

Reconfigurations identitaires et culturelles

Si Biram est enfermé dans sa situation de clandestin, lorsqu'il retournera au Sénégal, il aura la sensation « d'avoir vécu assez et accompli ce qu'on n'ose même pas imaginer quand on enfant », parce qu'il « avait marché le monde, […] et coudoyé l'humanité52 ». Les reconfigurations identitaires se produisent ainsi à travers la confrontation à l’altérité qui se produit dans les espaces frontaliers ; en effet, ceux-ci se situant entre divers espaces, ils instituent des lieux de convergences entre des parcours aux origines diverses. Les héroïnes du roman Humus proviennent de différents territoires d’Afrique et témoignent de leur rencontre. Le roman offre en effet une large place au récit des liens qui se créent entre elles, qu’ils soient amicaux, amoureux ou conflictuels. Dans tous les cas, ils participent à la revendication d’un « nous » collectif, incarné par l’acte fédérateur que constitue le saut dans l’océan : « J'ai. / Je. / Nous avons sauté. / Ensemble. Nous avons. / Sauté. Mer. Sautez ! Nous. / L'avons fait53 ». C’est à travers celui-ci qu’elles investissent l’Atlantique non plus comme un lieu d’enfermement, mais au contraire comme un lieu d’émancipation, puisque c’est avant tout pour échapper à leur condition d’esclave qu’elles forment le projet de cet acte de rébellion. Il y a donc un mouvement qui s’opère, à travers le récit collectif, celui-là même qui reconfigure l’aspect « liminal » de l’espace frontalier que constitue l’océan en un lieu fondamentalement « liminaire »54. Le navire duquel les captives tentent d’échapper rappelle alors celui qui métaphorise l’Atlantique noir :

C'est pourquoi j'ai choisi l'image d'un navire voguant entre l'Europe, l'Amérique, l'Afrique et les Caraïbes comme point de départ et comme symbole de cette entreprise. L'importance de l'image du navire – un système micro-culturel et micro-politique vivant et en mouvement – s'explique par des raisons historiques et théoriques [...]. Cette image attire immédiatement notre attention sur le « Passage du Milieu », sur les divers projets de retour rédempteur à la patrie africaine, et sur la circulation d'idées [...]55.

L'Atlantique noir symbolise en effet l'ensemble des transformations culturelles qu'a entraînées la Déportation transatlantique des Subsahariens et est défini comme un espace de mémoire et de culture communes reliant les populations afrodescendantes établies en Afrique, en Amérique et en Europe. Or, le roman Humus relie lui aussi ces trois continents. L’Europe s’inscrit dans le récit à travers des chants de marins qui transitent entre les chapitres, ainsi qu’à travers la relation amoureuse qui se tisse entre le personnage de La Blanche et le capitaine du navire ; certaines des héroïnes du roman racontent aussi leur arrivée et leur quotidien aux Antilles ; enfin, les personnages témoignent des souvenirs de leur terre natale, qui se trouve en Afrique, de la capture et de l’embarquement vers le « Nouveau Monde ».

L’intermédialité diasporique

C’est là, dans ce point de départ, que naît selon Fabienne Kanor la créolité qui est la sienne et celle de ses personnages, à l’instar de la figure de L’Esclave du roman Humus, qui a d’abord subi la traite arabe, traversé de nombreux territoires d'Afrique puis qui a été vendue à des Occidentaux pour finalement être déportée outre-Atlantique. Son parcours, aussi douloureux fût- il, lui fait dire qu'elle est « Peule parmi les Peuls, Mossi chez les Mossi, Bambara, Yoruba. Homme, femme, enfant56 ». Aussi, Fabienne Kanor, en reprenant une image chère à Édouard Glissant57, dit écouter « l’avertissement fondamental de Césaire (“Regardez les Antilles, et vous verrez l’Afrique”) ; car le processus de créolisation commence déjà là-bas. Pas quand le bateau accoste dans ce qui deviendra les Antilles, mais bien avant l’embarquement, dans ces cachots où l’on parquait les Africains issus de toutes souches58 ». Bien plus que dans les Antilles, l’auteure « définit son territoire et façonne son identité » dans ces lieux et moment originels et dans l’espace afrodiasporique qu’ils ont fait naître. Ses personnages sont en effet presque systématiquement des Afrodescendants et ils « ont des histoires communes, qu’elles se passent en Afrique, dans la Caraïbe, ou dans l’Amérique noire59 » ; à travers leur parcours et leurs déplacements, ils tissent les contours d’un « terroir noir60 ».  L’exploration de ce lieu, auquel l’auteure dit se sentir appartenir, lui permet alors « de décliner l’identité antillaise à l’infini et de réfléchir de manière plus large à la question coloniale61 », tout en englobant ses appartenances multiples. Or :

[...] cette multi-appartenance ne se cantonne pas à être l’apanage d’une identité singulière, forgée par les circonstances d’un parcours de migrance : elle est productrice d’un agencement modifiant de façon significative, fût-ce en un lieu et un moment tous deux ponctuels, la physionomie du monde, enclenchant des poétiques qui inscrivent cette conscience diasporique au cœur d’un processus de création multiplayer. L’artiste multiplayer est justement défini par Clémentine Deliss comme un artiste « intermédiaire », autrement dit quelqu’un qui s’empare des pratiques artistiques comme d’un levier pour agir à travers la société62

Les reportages radio que Fabienne Kanor a produits pour France culture en 2012 sont significatifs en ce sens. En effet, ils s’intéressent aux conséquences de l’histoire de l’esclavage et de la colonisation française sur les pratiques culturelles, sociales et intimes des habitants de la Guadeloupe et de la Martinique contemporaines. Par ailleurs, ils se caractérisent, d’un point de vue esthétique par des aspects multimodaux. Faits historiques, témoignages, création sonore, musique, lectures d’extraits de textes littéraires ou de slam, interventions personnelles de la journaliste...alternent sans transition. Cette pluralité des formes de création s’étend à l’ensemble de l’œuvre de Fabienne Kanor, qui ne se cantonne pas uniquement à la littérature, mais s'ouvre au contraire à une multiplicité de supports d'expression : le son – à travers l’oralité, la musique... –, l’image – à travers les productions cinématographiques, les visites des lieux racontés, la pratique documentaire, les descriptions des espaces – et le texte – à travers l’écriture, mais aussi l’intertextualité – s’y entremêlent. L'intermédialité, qui formule la médiation entre les différentes disciplines artistiques63 s’alimente ainsi de la recherche d’une médiation entre les différentes cultures qu’habite l’auteure. Elle témoigne en outre « des hantises d’une conscience diasporique dont la texture plurielle s’incarne à travers la recherche de passerelles entre les pratiques artistiques, de sorte que l’œuvre en quête de totalité réfracte la densité des voix, émanant des lieux multiples, qui cohabitent en elle64 ».

Création d'un tiers-espace

Fabienne Kanor dit en effet qu’elle n’est ni « Antillaise, ni Française, ni Africaine, mais férocement flottante65 ».L’exploration de la création combinée à celle des espaces et des temps formule finalement un « tiers-espace66 » qui n'existe qu'à travers la fusion de ces entités : « À l’intérieur de celui-ci, l’individu se meut dans un environnement culturel labile, qui coïncide avec un espace perpétuellement mobile et une temporalité fluide67 ». Cela apparaît dans le court-métrage expérimental Des pieds mon pied, dans lequel la réalisatrice interroge ses propres appartenances à partir de son histoire individuelle et familiale et de ses pieds qui la portent à travers le monde. Ils « enjambent » les frontières tant spatiales que temporelles, croisent ceux de son père mais aussi ceux des Afrodescendants d’hier et d’aujourd’hui ; ils inscrivent leur trajectoire dans l’histoire de la Déportation mais aussi dans celle des migrations contemporaines des Suds vers le Nord : 

J’ai rêvé d’un bateau, avec dedans des milliers de bouts d’hommes. Ils ressemblaient à des cuillères ces hommes. Ils rampaient. On aurait dit qu’ils n’avaient plus de pieds. Plus tard, un petit livre disait que chaque esclave sera châtié. On lui sectionnera le jarret. J’ai vu des nègres, pendus à des arbres et dont les pieds ne touchaient plus le sol. J’ai vu des mains prendre mes pieds pour en faire des fers, des cannes à sucre, des claquettes. J’ai vu mes pieds, je les ai vus mes pieds, emboîter le pas, de ceux qui marchent la mer, le désert, les frontières. Longtemps, je n’ai pas su porter mes pieds68 .

C’est parce qu’elle explore et accepte cet héritage que l’auteure assume finalement son hybridité. Or celle-ci « rend possible l’émergence d’autres positions » et finalement « ce tiers-espace vient perturber les histoires qui le constituent et établit de nouvelles structures d’autorité69 ». Le texte littéraire s'impose alors comme un support idéal pour raconter ce troisième lieu parce qu’il offre une infinité de possibilités et parce qu’il permet de « désordonner » le monde ; c’est ainsi que l’envisage Fabienne Kanor, qui explore dans ses productions des sujets parfois tabous et souvent intimes. Ses personnages peuvent déranger, dans la mesure où ils transgressent souvent les barrières de la morale traditionnelle et celles des conditions que leur assignent leur couleur de peau, leur classe ou leur genre. Le texte littéraire plus particulièrement, « de par son inséparabilité, et, par extension, d’un mouvement transfrontalier prohibitif, déploie un potentiel transformatif en déconstruisant le modèle binaire du monde70 », à savoir la frontière Nord / Sud, que ses personnages traversent sans cesse.  À travers les circulations qu’elles racontent, Fabienne Kanor cherche en effet à dépasser la distinction de ces deux parties du monde qui se sont sans cesse confrontées. Au-delà des conflits, les cultures contemporaines héritent aussi des rencontres que l’histoire a engendrées. C’est à travers celles-ci que se définit « l’écrivaine des passages71 » qu’est Fabienne Kanor, ainsi que les fonctions qu’elle attribue à la littérature :

Il faut écrire.
Il faut écrire encore pour se consoler d'hier, explorer les enjeux d'aujourd'hui, pressentir les tremblements de demain.
Encore, écrire, encore pour que ce grand jour historique fasse des petits, pour qu'un mur ne soit plus un mur qui empêche de rentrer et de sortir, mais une fenêtre sur, un chemin vers. Une lézarde72.

Notes

 

 

1

1 Fabienne Kanor, entretien avec Jason Herbeck, « Entretien avec Fabienne Kanor », The French review, 2013, n°86/5, p. 963-976, p. 974.

2

2 Fabienne Kanor, entretien, Franc parler avec la romancière Fabienne Kanor [vidéo], 2016 [en ligne : https://www.youtube.com/watch?v=sveL9E4bPUs&t=32s]. Nous retranscrivons.

3

Fabienne Kanor, « ˝Faire l’aventure˝ : l’Odyssée de l’exil », Outre-Mer 1°, publié par Philippe Triay le 05/02/2014 [en ligne :https://la1ere.francetvinfo.fr/2014/01/24/fabienne-kanor-faire-l-aventure-l-odyssee-de-l-exil-104443.html], consulté le 28/12/2018.

4

4Tout au long de cet article, nous reprenons la notion de « Déportation transatlantique des Subsahariens » que Léonora Miano défend et revendique dans son texte « Parole due », publié dans le recueil L’Impératif transgressif, Paris, L'Arche, 2016, coll. « Tête-à-tête », p. 141-183.

5

Fabienne Kanor, Humus, Paris, Gallimard, 2006, coll. « Continents noirs ».

6

Fabienne Kanor, « En Martinique, à la gauche des hommes » ; « Martinique, une terre d’hommes cassée »; Martinique, des petits morceaux de femmes » ; « Le crack en Guadeloupe », Sur les docks [reportages radio], France Culture, juillet 2012.

7

Fabienne Kanor, Faire l’aventure, Paris, J.-C. Lattès, 2014.

8

Fabienne Kanor, Des pieds, mon pied [court-métrage] 2009, [En ligne : https://www.youtube.com/  watch?v=  R2YsQpshHsQ&t=34s].

9

Fabienne Kanor, D’eaux douces, Paris, Gallimard, 2004, coll. « Continents noirs ».

10

Fabienne Kanor, Emmanuelle Bidou, Jambé dlo : une histoire antillaise [film documentaire], France Cinq, 2008.

11

Fabienne Kanor, Je ne suis pas un homme qui pleure, Paris, JC Lattès, 2016.

12

Fabienne Kanor, Anticorps, Paris, Gallimard, 2010, coll. « Continents noirs ».

13

Fabienne Kanor, Les chiens ne font pas des chats, Paris, Gallimard, 2008, coll. « Continents noirs ».

14

Paul Gilroy, L’Atlantique noir, Modernité et double conscience [1993], Paris, Éditions Amsterdam, 2017.

15

Fabienne Kanor, entretien avec Eloïse Fagard, « Ma communauté, c'est celle de mes personnages », Afrik.com, publié le 14 juin 2008 [en ligne : www.afrik.com/articlel4498.html], consulté le 28/12/2018.

16

Homi K. Bhabha, Les lieux de la culture, Une théorie postcoloniale [1994], Paris, Payot, 2007.

17

Fabienne Kanor, entretien avec Eloïse Fagard, « Ma communauté, c'est celle de mes personnages », op. cit.

18

Gilles Deleuze, Félix Guattari, L'Anti-Œdipe, Paris, Éditions de Minuit, 1972.

19

Fabienne Kanor, entretien avec Jason Herbeck, « Entretien avec Fabienne Kanor », op. cit., p. 971.

20

Fabienne Kanor, Humus, op. cit., p. 17.

21

Léonora Miano, L’Impératif transgressif, op. cit., p. 143.

22

Patrick Chamoiseau, Un dimanche au cachot, Paris, Gallimard, 2007, p. 46.

23

Fabienne Kanor, entretien avec Ayoko Mensah, « J’ai éprouvé l’urgence à dire », Africultures, 2006, nº67, [en ligne : http://africultures.com/jai-eprouve-lurgence-a-dire-4470/].

24

Léonora Miano, L’Impératif transgressif, op. cit., p. 34.

25

Fabienne Kanor, Faire l’aventure, op. cit., p. 119.

26

Nathalie Etoke, Melancholia Africaine, L'indispensable dépassement de la condition noire, Paris, Éditions du Cygne, coll. « Mémoires du Sud », 2010, p. 24.

27

Fabienne Kanor, entretien avec Gladis M. Francis, « Fabienne Kanor, ˝l’Anté-llaise par excellence˝: sexualité, corporalité, diaspora et créolité », The French Forum, hiver 2016, n°41/3, p. 273-288 [en ligne : https://doi.org/10.1353/frf.2016.0035], p. 275.

28

Dans la culture antillaise, la femme potomitan représente le pilier du foyer et de la vie familiale.

29

Fabienne Kanor, D’eaux douces, op. cit., p. 7.

30

Ibid., p. 120.

31

Fabienne Kanor, entretien avec Gladis M. Francis, « Fabienne Kanor, ˝l’Anté-llaise par excellence˝: sexualité, corporalité, diaspora et créolité », op. cit., p. 280.

32

Fabienne Kanor, Humus, op. cit., p. 14.

33

Fabienne Kanor, Faire l’aventure, op. cit., p. 283.

34

Léonora Miano, Écrits pour la parole, Paris, l’Arche, 2012, coll. « Scène ouverte », p. 66.

35

La notion d’ « intersectionnalité » a été forgée par Kimberlé Crenschaw en 1989 (notamment dans l’article « Cartographie des marges : Intersectionnalité, politiques de l'identité et violences contre les femmes de couleur » [1991], Cahiers du genre, 2005/2, no 39, p. 51-82), pour signifier l’entrecroisement du racisme et du sexisme dont sont victimes les femmes afro-américaines. Aujourd’hui, le terme est plus largement employé pour parler des combinaisons de formes d’oppressions multiples (genre, classe, race etc.).

36

Fabienne Kanor, D’eaux douces, op. cit., p. 66-67.

37

Célia Sadai, « ˝D’eaux douces˝ de Fabienne Kanor, Triptyque cruel sur un corps insulaire », La Plume francophone, publié le 02/04/2009 [en ligne :http://la-plume-francophone.over-blog.com/article-29794601.html], consulté le 28/12/2018.

38

Fabienne Kanor, entretien avec Gladis M. Francis, « Fabienne Kanor, ˝l’Anté-llaise par excellence˝: sexualité, corporalité, diaspora et créolité », op. cit., p. 277.

39

Homi K. Bhabha, Les lieux de la culture, Une théorie postcoloniale, op. cit., p. 35.

40

Fabienne Kanor, Faire l’aventure, op. cit., p. 11.

41

Fabienne Kanor, entretien avec Jason Herbeck, « Entretien avec Fabienne Kanor », op. cit., p. 974.

42

Fabienne Kanor, Faire l’aventure, op. cit., p. 144.

43

43Michel Agier définit le versant « liminal » de la frontière comme étant celui qui place des individus « à l’écart », en situation de « marges » et dans un « état à peine perceptible, à peine audible et “sans voix”» ; il réserve la notion de « liminaire » pour définir « la frontière sous son aspect rituel », marquant le « le passage d’un seuil et l’entrée dans une “loi” différente pour chaque acteur qui s’y trouve et qui prend là de nouvelles identités » (Michel Agier, La Condition cosmopolite : l’anthropologie à l’épreuve du piège identitaire, Paris, La Découverte, 2013, p. 49-50).

44

Ibid.

45

Fabienne Kanor, entretien avec Jason Herbeck, « Entretien avec Fabienne Kanor », op. cit., p. 965.

46

Ibid., p. 966.

47

Fabienne Kanor, Humus, op. cit., p. 241.

48

Fabienne Kanor, « ˝Faire l’aventure˝ : l’Odyssée de l’exil », op. cit.

49

Fabienne Kanor, Faire l’aventure, op. cit., p. 282-284.

50

Fabienne Kanor, Humus, op. cit., p. 63-64.

51

Ibid., p. 25.

52

Fabienne Kanor, Faire l’aventure, op. cit., p. 362.

53

Fabienne Kanor, Humus, op. cit., p. 21.

54

Voir à ce propos la note de bas de page 42.

55

Paul Gilroy, L’Atlantique noir, Modernité et double conscience, op. cit., p. 36.

56

Fabienne Kanor, Humus, op. cit., p. 64.

57

« La véritable genèse des peuples de la Caraïbe, c’est le ventre du bateau négrier » (Édouard Glissant, Traité du tout-monde, Paris, Gallimard, 1997, p. 36).

58

Fabienne Kanor, entretien avec Gladis M. Francis, « Fabienne Kanor, ˝l’Anté-llaise par excellence˝: sexualité, corporalité, diaspora et créolité », op. cit., p. 274.

59

Fabienne Kanor, « ˝Faire l’aventure˝ : l’Odyssée de l’exil », op. cit.

60

Ibid.

61

Fabienne Kanor, entretien avec Jason Herbeck, « Entretien avec Fabienne Kanor », op. cit., p. 974.

62

Catherine Mazauric, « Débords musicaux du texte : vers des pratiques transartistiques de la désappartenance (Léonora Miano, Dieudonné Niangouna) », Nouvelles Études Francophones, Lincoln, Presses Universitaires du Nébraska, 2012, n° 27/1 p. 99-114, p. 103.

63

Eric Méchoulan, « Intermédialités : le temps des illusions perdues », Intermédialités, Montréal, Presses de l’Université de Montréal, 2003, n°1, p. 9–27.

64

Catherine Mazauric, « Débords musicaux du texte : vers des pratiques transartistiques de la désappartenance (Léonora Miano, Dieudonné Niangouna) », op. cit., p. 100.

65

Dominique Aurelia, « Fabienne Kanor, La Pacotilleuse », Pluton Magazine, publié le 06/03/2017 [en ligne : http://pluton-magazine.com/2017/03/06/fabienne-kanor-la-pacotilleuse/], consulté le 28/12/2018.

66

Homi K. Bhabha, Les lieux de la culture, Une théorie postcoloniale, op. cit., p. 35.

67

Laëtitia Tordjman, « Avant-gardes diasporiques et émergence du « tiers espace » : Banjo de Claude McKay et Les Contrebandiers d’Oser Warszawski », Itinéraires, 2015/2 | 2016, publié le 15/02/2016, [en ligne : http://journals.openedition.org/itineraires/2848], consulté le 28/12/2018.

68

Fabienne Kanor, Des pieds, mon pied, op. cit. Nous retranscrivons.

69

Homi K. Bhabha, entretien avec Jonathan Rutherford, « Le tiers-espace », Multitudes, 2006/3, n°26, p. 95-107, p. 99.

70

Antje Ziethen, « La littérature et l’espace », Arborescences : revue d’études françaises, 2013, n°3 [en ligne : http://id.erudit.org/iderudit/1017363ar], p. 6.

71

Dominique Aurelia, « Fabienne Kanor, La Pacotilleuse », Pluton Magazine, publié le 06/03/2017 [en ligne : http://pluton-magazine.com/2017/03/06/fabienne-kanor-la-pacotilleuse/], consulté le 28/12/2018.

72

Fabienne Kanor, « Discours de réception du prix Carbet par Fabienne Kanor », Institut du Tout-monde, 2014 [en ligne : http://www.tout-monde.com/prixcarbet2014laureat.html], consulté le 28/12/2018.

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