Confrontées à l’effondrement des grands modèles idéologiques de la deuxième moitié du XXe siècle et à une mondialisation qui ébranle leurs assises sociales et leurs références culturelles nationales et linguistiques, les sciences humaines semblent s’être réfugiées depuis une vingtaine d’années dans une investigation essentiellement quantitative et descriptive.
Parallèlement à ce recul théorique, qui fragmente et isole les champs disciplinaires, la logique du corpus, toujours plus étendu grâce aux nouvelles technologies d’archivage, de diffusion et d’exploitation des données, crée une demande de plus en plus pressante d’interdisciplinarité. Pour analyser son corpus, le chercheur recourt à un vocabulaire scientifique qui désormais s’inscrit dans une histoire mondialisée des sciences humaines. Les notions qui surgissent, au niveau mondial, dans son champ disciplinaire ont souvent un passé européen, et même plus précisément franco-allemand. Elles ont été sorties de leur contexte d’origine, adaptées à un autre contexte culturel, social, idéologique.
Faut-il pour autant n’interpréter ce brassage qu’en termes de déperdition et d’artefacts ? Et s’il préludait au contraire à une vaste recomposition, mondiale et multipolaire, des modélisations théoriques en sciences humaines ? Notre responsabilité historique aujourd’hui est double : nous réapproprier un patrimoine théorique européen qui s’est mondialisé ; refonder un discours théorique exigeant, dans une relation critique à la fois avec ses origines et avec les métissages auxquels il a donné lieu.
Ont participé à ce numéro :
- Andrea Allerkamp
- Fanny Chevalier
- Sara De Balsi
- Agnès Delage
- Mélanie Fakheur
- Maud Gaultier
- Nicolas Guérin
- Apostolos Lampropoulos
- Daniel Liotta
- Stéphane Lojkine
- Giuseppe Lovito
- Francesca Mambelli
- Éric Marty
- Émile Rat
- Cécile Raulet
- Évelyne Toussaint