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La réticence, figure de cohérence

Lire Marivaux entre les genres, c’est pour moi lire une œuvre dans son entier et tenter d’en saisir, d’en construire, la cohérence, l’unité. Il s’agira donc ici de proposer une synthèse, ou plus exactement une mise en faisceau de caractéristiques et de faits – sans ambition bien sûr d’exhaustivité puisque c’est de toute façon impossible – marquants et distinctifs de l’œuvre marivaudienne.

Toutes choses différentes par ailleurs, et avec toute la modestie qui sied au geste, je voudrais pour cela m’abriter derrière la posture d’un Claude Lévi-Strauss qui, au moment de passer à l’application pratique, au mythe d’œdipe, de la méthode dont il a présenté l’élaboration et les principes, celle de la lecture structurale des mythes, dans le chapitre d’Anthropologie structurale, se compare au bonimenteur sur les marchés, qui n’a d’autre but que de montrer sa machine sans se préoccuper de l’utilité du résultat. Claude Lévi-Strauss affirme ne pas vouloir aboutir à l’interprétation d’un mythe fondateur d’ailleurs très mal choisi, – c’est lui qui le dit –, interprétation qui soulèverait sans doute une volée d’indignation, mais seulement de faire la démonstration de la virtuosité de son système. Toutes proportions gardées, je voudrais échafauder ici une lecture d’ensemble de l’œuvre de Marivaux, en ériger une logique, en déclarant d’emblée que mon petit château se dressera tranquillement en Espagne, et que si ses briques, que j’emprunterai le plus souvent à d’autres, sont solides, leur assemblage périlleux aura la consistance du rêve ou des nuages, ou pour dire les choses plus trivialement, de l’hypothèse. Nulle vérité totale dans ces élucubrations, seulement des possibilités et une interprétation. Cette entreprise de bâtisseur m’amènera à envisager un certain nombre de questions, et dont le château marivaudien serait en quelque sorte la maison-témoin : pourquoi écrire ? Pourquoi choisir de devenir un auteur ? Est-ce véritablement par choix qu’on le devient ? Est-ce tout à fait la même chose que de devenir écrivain ? Que signifie cette place dans l’espace social ? Est-ce facile ? Qu’écrire alors, et comment écrire ? Pourquoi écrire des romans ? Pourquoi écrire des pièces de théâtre ? Qu’ont en commun formes narratives et formes dramatiques ? Pourquoi écrire des romans et du théâtre ?

Pour matériaux de construction de ce château hypothétique, la vie de Marivaux, telle qu’on la connaît, c’est-à-dire déjà subtile et fragmentaire, se prêtant par cet aspect incertain et lacunaire à cette invention de la vie d’un auteur dont Barthes rêve sous la forme des biographèmes1, mais vie aussi se mêlant le plus naturellement à ses textes2. Pour matériaux de construction bien sûr, l’ensemble de ces textes de Marivaux et les lectures qui en ont été faites, mais que je voudrais considérer en y isolant sur le modèle des biographèmes, ce qui pourrait recevoir, à l’essai, le nom d monographèmes3, non en vertu d’un caractère parcimonieux et circonstanciel que ces traits n’ont pas ou peu, mais pour le geste de récolte subjective, de dilection fragmentaire et d’invention d’une œuvre à travers la lecture transversale qu’on en fait comme on passerait une rivière à gué : retenir par exemple la « le double registre » mis en lumière par Jean Rousset4, l’arabesque du marivaudage, la coquetterie, à la fois ethos et style, ou encore l’inachèvement.

Pour esquisser cette construction de la cohérence de l’œuvre marivaudienne, c’est-à-dire de cette interpénétration, cette éclairage réciproque de la vie et des textes, m’est apparue pertinente une autre notion empruntée à Barthes, celle de réticence. Barthes la propose dans S/Z comme instrument narratologique : reposant sur la distinction entre le code proaïrétique, le code des actions dont le récit fait avancer l’intrigue, et le code herméneutique qui est celui de la lecture, elle permet de rendre compte de phénomènes textuels que Barthes désigne par les termes d’« arabesques », forme clé du rococo et de la néo-préciosité dans laquelle s’est inscrit le marivaudage défini comme style5, de « retards dirigés »6. Mais cette notion a la vertu de présenter une polysémie heureuse, puisqu’elle relève non seulement du champ de l’analyse du récit, mais aussi de la rhétorique et de l’ethos. En effet, la réticence est l’action de taire à dessein une chose qu’on pourrait ou qu’on devrait dire, c’est-à-dire un acte de dissimulation, et c’est aussi le caractère ou la qualité d’une personne qui se définit par cette pratique. C’est encore une figure consistant à ne pas terminer un énoncé dont le contenu reste clair. C’est enfin, dans un sens moral et psychologique, une réserve mêlée de désapprobation, qui donne lieu à une hésitation, signe avec lequel elle peut se confondre puisqu’elle la manifeste.

Réticence et textes possibles

Je ne traquerai pas ici systématiquement les occurrences de réticence rhétorique qui sont le fait des personnages de Marivaux au théâtre comme dans les romans, qui ne m’intéressent que si elles sont suffisamment étendues pour devenir de véritables phénomènes de poétique textuelle. C’est le cas par exemple du comportement discursif de Marianne dans la scène qu’ouvre l’accident de carrosse dont elle est victime et qui la conduit chez Valville. La petite réticence morale de Marianne à dévoiler son pied devant Valville, sa grande réticence, due à une honte sociale et existentielle, à lui donner son adresse chez une lingère, se traduisent en réticence textuelle au sens où Barthes l’entend. La scène s’étire en circonvolutions multiples, n’en finit pas, le texte piétine parce que Marianne est en proie à l’indécision, hésite sur le parti qu’elle doit prendre, attitude qui peut s’analyser comme une incarnation psychologique de la réticence à faire un choix mais aussi comme la difficulté du romancier à abandonner tous les romans possibles au profit d’un seul7. Marc Escola avait fait déjà cette analyse pour Le Paysan parvenu8, mais ne peut-on pas voir les prémisses de cette mise en récit de l’embarras du choix poétique et de la réticence auctoriale dans les romans de jeunesse de Marivaux. Le narrateur-écrivain fictif de Pharsamon, désolidarisé de ses personnages qu’il fait agir comme des pantins, dévoile ainsi les partis qui s’offre au romancier, suspendant du même coup l’action et le texte dans des boucles méta-narratives :

Eh bien, cher lecteur, êtes-vous content de la vie de la belle solitaire ? Je me suis, dites-vous, quelquefois trouvé dans l’embarras ; qu’importe, si je m’en suis bien tiré je n’en aurai que plus de mérite ; quand on ne sait où l’on va, s’il arrive qu’on se conduise passablement, on est plus adroit que ceux qui marchent la carte en main ; je serai, je vous assure, et soit dit sans vanité, assez content de moi si je puis tirer Pharsamon d’ici avec autant de succès ; allons, allons toujours le hasard y pourvoira. Auquel des deux irons-nous maintenant ? A Clorinne ou à Pharsamon ? Disons une mot de Mme Clorinne, et puis nous rejoindrons ce triste chevalier qui ne s’ennuiera pas à nous attendre.9 

Le dîner mangé, nos quatre personnages allèrent se promener dans un petit bois enclos dans la maison ou bien dans un vaste jardin, ce doit être l’un ou l’autre, je ne sais pas bien lequel des deux ; car je n’ai point deux partis à prendre. Si je parlais d’amants suivants nos mœurs, je dirai une terrasse, ou je les mettrais dans une chambre ; mais en fait de tendresse romanesque, les jardins, les bois, les forêts sont les seules promenades convenables, de sorte que fallût-il faire promener mille fois dans le jour, à moins d’innover, je n’aurais que ces trois lieux à citer : tout ce que je pourrais faire en faveur du lecteur ennuyé, serait de les déguiser en solitudes, longues allées, y mêler des bosquets etc. [...]10

Dans La Voiture embourbée, ce petit récit impromptu mais surtout composé à plusieurs, anticipation de cadavre exquis étendu et romanesque, on retrouve des embarras du choix de cette espèce : « Je [c’est un des narrateurs improvisés qui parle] ne vous dirai pas au juste si ce sommeil fut naturel ; peut-être que les yeux d’une héroïne d’amour sont stylés à concourir à tout ce qui peut composer un goût complet de noble tendresse. »11. Mais Marivaux n’y propose-t-il pas déjà la mise en récit d’une réticence à choisir, les multiples narrateurs successifs partant chacun dans la direction qui leur plaît malgré les contraintes qui s’imposent à eux, et qui expriment leur condition et leur caractère, et ne la signale-t-il pas par son titre, véritable pain béni pour celui qui s’intéresse à l’incertitude du récit confronté à tous ses possibles12. Choisir : choisir un fil narratif à suivre, des fils à sacrifier, mais aussi le genre de roman à écrire :

Oh ! mon Dieu ! Répondit-elle, mais vraiment l’entreprise me paraît plus sérieuse que je ne pensais, et je vous avoue qu’il faut que vous optiez, ou du comique, ou du grand, car franchement je n’ai point assez de capacité pour soutenir la critique que vous venez de faire des amours apparemment romanesques ; cette critique est mêlée successivement de sérieux et de burlesque, n’espérez point les deux avec moi.13

Et ne peut-on pas voir dans cette explicitation qu’est le jeu narratif de La Voiture embourbée l’hésitation de Marivaux lui-même au début de son œuvre entre deux registres romanesques, le « grand » (représenté par Les Effets surprenants de la sympathie), et le comique ( dont les représentants sont Le Télémaque travesti et L’Homère travesti), registre comique ou burlesque qui me semble incarner à lui seul en abyme cette difficulté du choix, dont l’autre versant est la volonté de conciliation, puisque la parodie dans son entreprise de subversion même est toujours hommage au grand, d’une manière différente de Pharsamon ou toujours de La Voiture embourbée, qui font alterner aussi les registres héroïque ou merveilleux et ceux du trivial ou du comique. De cette alternance, il reste des traces jusque dans les deux romans de maturité. Dans La Vie de Marianne la réticence psychologique du personnage qui produit la réticence narrative a pour enjeu la fameuse scène de dispute du cocher et de la lingère, c’est-à-dire l’irruption de la grossièreté populaire dans la dignité romanesque vertueuse et héroïque. Le Paysan parvenu, lui, hésite entre le roman moral et le roman « réaliste »14.

Dans le théâtre de Marivaux aussi, la réticence éprouvée par les personnages, ici plus affective que morale, peut contaminer l’intégralité du texte, constituant le sujet même de la pièce. Beaucoup de ses comédies ont en effet pour enjeu une déclaration d’amour et peuvent être considérées comme le déploiement et la résistance d’une réticence d’un, de deux, de trois personnages, résistance contrariée par d’autres jusqu’à l’aveu final. Ne pas succomber à l’amour ou a contrario le faire naître, ne pas dire l’amour ou a contrario le faire dire constitue alors les deux mouvements d’un même ressort dramatique. Un bon exemple de cette tendance est Le Legs, qui condense une intrigue constituée d’un seul fait – l’aveu de son amour pour la Comtesse par un marquis timide malgré un testament qui lui demande d’épouser une Hortense amoureuse d’un Chevalier ou de lui donner deux cent mille livres – dans un acte unique qui semble pourtant se dilater à la recherche d’un échange impossible. Voici trois répliques du marquis, prenant place dans une scène remarquable par sa longueur, qui explicitent, tout en l’enrobant dans d’autres instruments de dérobade, rétractation, énallage de personne, la réticence : « Oh, j’en connais qui ne vous disent tout ce qu’ils songent. », « Mais je ne vous en dis mot, de peur de vous déplaire. », « calmez-vous, prenez que je n’ai rien dit. »15 C’est bien la réticence, réserve, discrétion qu’explique un caractère longuement détaillé16, qui « fait » la pièce. Marivaux cultive le paradoxe : son dialogue théâtral brode sur le silence.

On peut aussi analyser sur ce modèle les Surprises de l’amour, Le Jeu de l’amour et du hasard dans sa deuxième partie du moins, La Fausse suivante et d’autres, et Mathieu Brunet a montré dans un article sur les périphrases de l’amour dans ce théâtre combien la déclaration emprunte de détours17. Le détour, c’est certes le retard, mais c’est aussi la délégation, car il semble que l’amour doive toujours être dit d’abord par l’autre, qu’il soit l’être aimé qui veut se savoir aimé, ou plus souvent des tiers, domestiques intéressés, faux rivaux, expérimentateurs. La réticence initiale d’un ou plusieurs personnages, confrontée à la volonté contraire, détermine alors la singularité de la comédie marivaudienne, que Jean Rousset a fixée grâce à la notion de double registre, mais qu’on peut aussi analyser en termes de textes possibles. Michel Charles affirmait dans Introduction à l’étude des textes que « la multiplication des textes est dans l’essence du théâtre »18, et effectivement le texte de théâtre se donne plus que tout autre comme un montage d’énoncés, chaque personnage produisant, par son discours et son écoute, sa réception du discours des autres, un texte différent, le texte effectif de la pièce résultant de la rencontre, mais aussi de la confrontation de ces textes que constituent le point de vue et la parole de chaque personnage. Je veux voir dans ce pluralisme, associée au dédoublement de registre et découlant d’un silence initial, un trait sinon équivalent, du moins proche, de la manifestation de l’embarras du choix dans les romans marivaudiens. La pièce la plus représentative à cet égard est celle des Fausses confidences, dans laquelle le personnage de Dubois et la pratique de la fausse confidence donnent à voir la fonction du dramaturge comme invention et gestion de possibles. Sous la conduite de Dubois, Dorante se situe successivement et même parfois simultanément dans des espace dramatiques différents, concurrents, ubiquité dont on peut faire la synthèse en disant que la pièce met finalement en scène la rivalité entre deux types de comédies, rivalité soutenue par une diffraction entre un plus grand nombre de destins possibles, l’une joyeuse, inoffensive, dans laquelle Dorante aime sincèrement Araminte et dans laquelle la société est capable de souplesse au point de favoriser les mariages d’amour contre les convenances, l’autre sérieuse, grave, et même cynique dans laquelle le jeune homme ambitieux épouse la riche veuve. Où est la réticence ici ? On la trouve, en son sens psychologique, dans l’impossibilité initiale de dire qu’ils aiment à laquelle sont soumis, chacun pour des raisons différentes et à des degrés différents, les personnages, Dorante (parce qu’il est le complice de Dubois), Araminte (parce qu’elle doit tenir son rang et que sa mère n’est jamais loin pour lui reprocher de ne pas le faire), ou Marton (par respect pour celui dont elle se croit aimé). Mais elle est surtout dans le ressort dramaturgique de la pièce, la fausse confidence étant une forme perverse de réticence puisqu’elle consiste à dire quelque chose tout en ne disant pas ce pour quoi on le dit, le dit dissimulant précisément l’objet du silence, la finalité réelle de la confidence.

Trous et fantômes

Bien sûr, l’exhibition du choix entre plusieurs possibles est aussi toujours prétérition, figure qui complète la réticence (même sens original d’ailleurs, « action de passer sous silence » pour la première, « action de taire » pour la seconde), la prolonge en la niant par son affirmation même puisqu’elle consiste à dire ce qu’on ne veut ou ne peut pas dire, pour signifier cette volonté ou cette impossibilité. Ainsi, si la réticence est silence, celui-ci peut être comblé ou laissé tel. La réticence est donc aussi un phénomène de détournement du discours, ou de substitution d’un discours à un autre : dire autre chose que ce que l’on pourrait ou devrait dire. Dans La Vie de Marianne, les « retards dirigés » dont parle Barthes, à la fois impossibles à refréner et absolument conscients et amusés, ce sont les digressions réflexives que la narratrice ne peut s’empêcher comme de substituer au récit promis et donc attendu, celui de son ascension sociale. Jean-Paul Sermain dans Marivaux et la mise en scène scène les évoque comme un des moyens par lesquels Marivaux « greffe » les propriétés du théâtre et des Journaux relatives au temps – immédiateté, discontinuité –, au roman-mémoire pour désamorcer les écueils de la rétrospection. Il désigne un autre de ces moyens comme « une sorte de réticence narrative qui empêche les mémorialistes de rien dire sur les conditions de leur ascension »19. Ce silence, cette suspension, cette fois non compensé par le récit, est on le sait une caractéristique majeure de l’œuvre narrative de Marivaux. Prenant la forme de l’inachèvement fondamental des romans de maturité, elle est présente dans les Journaux, où Marivaux lui donne de nombreuses justifications éditoriales et narratives : publication périodique capricieuse, occasion, dispositions d’esprit de celui qui écrit, respect des sources, excuses narratives dont le degré de narrativisation peut varier. Marivaux, à travers ses personnages écrivant, explique par exemple ces suspensions par ce fameux terme employé par Barthes pour décrire le phénomène de réticence, celui de retard, qui s’articule ici à la périodicité, qui suppose théoriquement une certaine régularité, des publications dans Le Mercure : « Cette feuille-ci a été retardée par des accidents qui n’arriveront plus par la suite, mais qui pourraient bien avoir causé la langueur que je crois sentir ici. »20 Dans la neuvième feuille du Spectateur français, l’écrivain fournit le début d’une lettre que lui a adressée une demoiselle, avec une écrite à son père et une autre à son amant, mais pas la fin : « J’interromps ici la suite de cette histoire, dont le reste ne peut se partager. »21 C’est donc ici une forme de pudeur qui sert d’explication, quand ailleurs des circonstances matérielles sont responsables la difficulté rencontrée par le spectateur pour déchiffrer l’écriture d’un traducteur dans la troisième feuille ou le cahier déchiré contenant l’histoire de la dame âgée dans la seizième feuille. La réticence, cette interruption frustrante autant que féconde, est d’autant plus affirmée dans les Journaux que ces textes se caractérisent aussi par les promesses qu’ils font et ne tiennent pas toujours. Ainsi dans la quatrième feuille du spectateur français : « Juges ! Que les devoirs de votre état sont nobles ! Mais je finis ; nous les examinerons ailleurs. »22 et il n’en sera jamais question. Ou encore à la fin de la sixième feuille : « Dans la feuille suivante, je donnerai le reste du rêve, et j’espère que ce qu’il a de curieux méritera l’attention de mes lecteurs », et le rêve reste sans fin. Enfin, au début de la dix-septième feuille, le spectateur remet à « une autre fois » de donner la suite du journal de son espagnol, et elle n’arrivera jamais. Cet ensemble de faits, de l’inachèvement des textes de Marivaux, aux suspensions des écrits des personnages de spectateurs, font des Journaux comme des romans, bien qu’avec des modalités différentes, des textes « troués » ou encore hantés par des fantômes, ces purs produits de la réticence, ce qui aurait dû, ce qui aurait pu être écrit et ne l’a pas été23.

Qu’en est-il de cette version de la réticence au théâtre ? De ce silence laissé silence, de ces vides textuels ? Les textes dramatiques ne peuvent pas rester inachevés. S’ils le restent, ils ne paraissent pas sur le théâtre, alors que l’inachèvement est une caractéristique récurrente et un risque consenti de la publication périodique propre aux textes narratifs marivaudiens. Pourtant, ce sont aussi des textes « troués » et eux aussi ont leur fantômes. De fait, la dimension scénique du théâtre le prête, davantage encore que les textes narratifs (même si la discontinuité des Journaux et des romans de Marivaux les rend exceptionnels à cet égard) dont les silences sont toujours écrit, toujours bruyants. Silence palpable sur la scène, mais aussi hors scène, car un texte de théâtre est composé des rencontres des personnages sur scène, de leurs dialogues visibles, mais aussi de tous les événements extra-scéniques rejetés dans les coulisses, non représentés ou indirectement représentés par des récits dont on ne peut jamais savoir s’ils relèvent ou non, ou à quel degré, de la fiction. Ces événements sont proprement invisibles, fantômes hantant la lecture ou la représentation, que l’on peut pressentir, deviner, ou même inventer24. C’est aussi pour cela que les textes dramatiques sont essentiellement multiples. Et les comédies de Marivaux, du fait du double registre et de la part que cette structure donne à l’invention, et donc à la fiction, le sont plus que d’autres.

Des textes cousus de fil blanc

Le constat que l’on fait de l’impossibilité de l’inachèvement du texte dramatique ne doit cependant pas occulter une autre similitude formelle entre le théâtre et les textes narratifs marivaudiens. Qu’est-ce qu’une fin ? Une clôture, certes, mais la polysémie du terme nous dit que c’est aussi un but. Et si l’achèvement est le fait d’arriver au bout, l’étymologie nous dit que ce bout, le chef, la tête, est souvent premier. La fin ne saurait se concevoir autrement qu’un rapport aux autres parties qui composent un tout, et notamment le début. Or, les réticences narratives de La Vie de Marianne et du Paysan parvenu qui empêchent les narrateurs de raconter leur ascension sociale peuvent très bien se justifier par le fait que cette ascension est inscrite dans le texte dès son titre ou son sous-titre : Marianne est Comtesse, Jacob est parvenu. Ce que l’inachèvement laisse définitivement en suspens, suspend à la figure de la réticence, ce sont les modalités de cette ascension, le chemin emprunté par le héros pour parvenir à cette fin par laquelle il se présente et se définit. Il s’agit précisément là du sujet de ses romans, de leur enjeu : la difficulté pour un individu de faire le choix parmi les moyens qui s’offrent à lui d’aller d’un point à un autre, que ce point final soit une place dans la société ou son identité profonde, la vérité de son être. Il me semble que les comédies de Marivaux ne se construisent pas autrement que les romans. Une très large partie de sa dramaturgie peut se caractériser comme une dramaturgie du projet, qui se réalise selon deux orientations, celle qui réalise le projet annoncé (Les Fausses Confidences, Le Père prudent et équitable, La Surprise de l’amour, La Double Inconstance, La Fausse Suivante, La Seconde Surprise de l’amour, Le Triomphe de Plutus, Le Jeu de l’amour et du hasard, Le Triomphe de l’amour, L’Heureux Stratagème, Le Petit-maître corrigé, Le Legs, La Joie Imprévue, Les Sincères, La Provinciale) et celle qui met en échec ce projet ou procède à la déconstruction ou à la correction du dénouement annoncé (Serments, Arlequin, Prince travesti, Dénouement, École des mères, Commère, Préjugé vaincu). Dans les deux cas, point de surprise. Les titres de Marivaux, surprise de l’amour, dénouements imprévus, joie de même, jeu du hasard, sont pour les lecteurs et les spectateurs, ironiques. Ce que je veux dire, c’est que dans la mesure où l’on sait très bien comment cela va finir, l’achèvement est aussi peu l’enjeu du texte dramatique que celui des romans. Ce qui compte, ce n’est pas ce qui est effectivement, mais ce qui pourrait être, les possibilités qui s’offrent aux personnages, non la pièce effective mais toutes les pièces possibles qu’elle contient. Les autres comédies de Marivaux qui ne relèvent pas de la dramaturgie du projet se proposent d’examiner à partir d’une situation donnée, presque toujours arbitraire et invraisemblable, quel pourra être le dénouement. Ce sont les épreuves ou les expérimentations imaginaires, mais qui ne sont là encore qu’apparemment ouvertes car la fantaisie de leur proposition laisse deviner la façon dont elle vont se terminer, et qui une fois encore n’est pas l’enjeu : ce qui compte là encore c’est l’offrande et l’épreuve des possibles.

Le partage de la création

Une conséquence de la réticence est de laisser place. Céder la parole. Les narrateurs se succèdent dans La Voiture embourbée ; le récit de Tervire vient relayer celui de Marianne, et beaucoup d’autres personnages dans le récit même de la narratrice racontent par bribes ou résument sa vie ; Mme Riccoboni donne une suite à cette Vie ; un correspondant du Spectateur chasse l’autre, l’Indigent philosophe reprend le flambeau du Spectateur, suivi lui-même par le Philosophe dans son cabinet ; ou encore, au théâtre, les valets rapportent la parole de leur maître qui ne veulent ou ne peuvent pas se parler, mentent pour eux, répètent ce qu’ils n’auraient pas dû entendre ou ou ce qui n’aurait pas dû être dit, etc. Les textes marivaudiens peuvent ainsi s’analyser comme la fiction, et en même temps le rêve d’une matière composée à plusieurs, une parole distribuée, une création partagée. « Félicie d’un air pensif, enfoncée dans la rêverie la plus mélancolique, suivit le premier chemin qui s’offrit. Je laisse la situation d’Amandor à traiter à un autre »25  peut-on lire dans le roman impromptu. Mais le geste le plus emblématique de ce partage est celui qui clôt, après des points de suspension, le Voyage dans le monde vrai : « Apparemment que le philosophe, à qui l’idée de ce monde était venue, n’a pas cru qu’il fût nécessaire de la pousser plus loin ; attendu sans doute que cette idée une fois donnée, tout le monde peut l’étendre, et s’en imaginer toutes les suites ».26

Je veux voir dans ce geste d’abandon, et n’en déplaise cette fois à l’étymologie, de don, la conséquence d’une réticence propre à Marivaux, dont les réticences des personnages et les réticences textuelles seraient les manifestations particulières, les traductions dans l’ordre de l’analyse psychologique ou sociale, et dans celui de la poétique. Non pas réticence à écrire, comme l’expriment à maintes reprises Spectateur et consorts, mais réticence à embrasser le statut d’auteur, réticence à l’égard de la vanité que confère le fruit de l’écriture, et de cette œuvre à laquelle elle donne naissance, que l’on croit unique et qui fait la singularité de son auteur. Cette réticence, il l’a fait exprimer et expliquer par ses narrateurs – Marianne étonnée elle-même d’écrire, le Spectateur qui refuse de se présenter comme un auteur et explicite, dans la huitième feuille, « Que le talent d’auteur traîne après lui de petitesses ! »27, ou l’Indigent philosophe dont la misère rieuse peut être interprétée comme une forme de retrait : « Quand un auteur regarde son livre, il se sent tout gonflé de la vanité de l’avoir fait, il en perd la respiration, il plie sous le faix de sa gloire[...] »28. Auparavant, et de façon apparemment plus distanciée29, dans les Lettres sur les habitants de Paris, Marivaux fait ainsi définir par son épistolier l’auteur comme le représentant le plus accompli de l’amour-propre qui caractérise l’humanité. En terme d’amour-propre, il est « l’homme supérieur ». Dans L’Île de la raison, si seuls le philosophes et le poète s’avèrent incorrigibles, c’est à cause de la vanité qui les définit et les distingue des autres hommes.

J’imagine alors Marivaux se posant la question de savoir comment échapper à la vanité. Je l’imagine, en recueillant ses rares et légers portraits, portraits d’un être dont le porte-à-faux social30 semble avoir été projeté sur sa position d’écrivain, et dont l’itinéraire paraît marqué par la tension entre l’engagement, dans la Querelle des Anciens et des Modernes, dans la société littéraire des salons, dans la vie théâtrale, et le retrait, dont l’anonymat de ses premiers textes ou la recherche de la singularité, affirmée dans les réflexions sur le style ou la création néologique, sont les manifestations. Lesbros de la Versane écrivait dans Esprit de Marivaux : « M. de Marivaux a été si supérieur à la petite vanité de passer pour Auteur, qu’il était résolu de garder l’anonyme » et il raconte ensuite l’anecdote selon laquelle il n’aurait abandonné cette résolution qu’à l’occasion de La Surprise de l’amour parce que Silvia réclamait de répéter la pièce avec son auteur. Marivaux consentit à lire la pièce avec elle, incognito, mais la lit si parfaitement qu’il fut reconnu. Peu importe que cette histoire, qui sent son roman, soit vraie ou fausse. Qu’elle existe est vrai et c’est ce qui fait sens.

Comment alors, une fois reconnu, échapper à la vanité d’auteur ? Comment y échapper tout en continuant à écrire ? Il me semble que Marivaux répond à cette question en composant une œuvre qui ne cesse de tenter de relativiser la littérature. On peut voir cette réduction symbolique dans la pratique marivaudienne des petits genres, pièces en un acte, feuilles volantes, ou encore dans celle des détournements sacrilèges que sont les travestissements. Elle est aussi dans la figuration de la littérature comme jeu qu’on peut lire dans Le Bilboquet. Cet objet allégorique qui donne son titre au conte, enfant de la Folie qui incarne la fiction31, avant de venir prendre la place du verbe et en particulier de la Galanterie, est singulièrement récupéré par sa mère au pays de l’Oubli auprès des génies d’auteurs, des poètes, des philosophes : il est ainsi production équivalente à un discours en tant que jeu, personnage équivalent à l’écrivain en tant que dieu, et d’équivalence en équivalence représente le caractère ludique de la littérature. Elle est encore dans la défense que Marivaux fait du droit des petits à la création, mise en œuvre dans Pharsamon, avec le récit de Cliton, petit paysan, qui déploie le même esprit de jeu et de liberté que le roman qui le contient et donne lieu à un véritable manifeste récusant les hiérarchies littéraires en sapant leur base sociale. De même dans La Voiture embourbée, c’est au campagnard que revient l’honneur de clore le roman impromptu, mission dont il s’acquitte en ramenant littéralement et au figuré la littérature à la vie, en pliant tout tambour battant dans une succession de repos, d’amours et de ripailles.

Marivaux échappe donc à la vanité par une des conséquences de la réticence, cette redistribution de la création pour emplir les silences, en refusant à la fiction les figures d’auteurs selon les règles pour les remplacer par des inconnus, des valets, des paysans, des orphelines, des parias, des vieillards, qui tous revendiquent sans y toucher une esthétique du caprice et du hasard, du jeu, de l’irrésolution et de l’incertitude qui montre combien l’écriture est semblable à la vie, pleine de doutes, de contrariétés, de ratures et de ratés. Il y échappe en écrivant des romans et des journaux, textes narratifs qui ne cessent de déléguer discours ou récit, en écrivant ces romans et ces journaux et du théâtre, le genre dont le principe même est cette distribution de la parole.

Pas de dénigrement ni de désenchantement dans cette relativisation de la littérature, mais au contraire, un universalisme qui la justifie, fondé sur la croyance dans les capacités fondamentales de chaque homme à ressentir et exprimer toutes les émotions humaine et dans la consubstantialité entre communauté générale de notre être et singularité individuelle. L’affirmation de cet humanisme permet de saisir l’œuvre de Marivaux dans sa totalité cette fois chronologique, au-delà de son évolution et de ses périodes, puisque c’est dans Réflexions sur l’esprit humain à l’occasion de Corneille et de Racine, écrit en 1748, reprenant l’analyse du sublime qu’il avait faite dans Pensées sur différents sujets en 1719 :

Il y a pour nous une formation aussi invariablement arrêtée, aussi diversement commune et complète que celle de chacun des autres êtres ; mais qui toute diverse qu’elle est, ne sortant jamais d’un certain cercle de variété convenable et propre à notre être, et qui par-là toujours générale, toujours uniforme, quoique toujours différente, se rapproche ou s’écarte plus ou moins dans chacun de nous, de la meilleure manière de formation commune et complète, de la meilleure espèce de conformité générale de figure et d’organe intérieurs qu’on puisse recevoir, et produit conséquemment autant de sortes de généralités d’attributs communs, qu’elle prend de formes différemment communes ; généralités qui, comme diverses, amènent toutes les différences plus ou moins considérables, souvent énormes qui nous distinguent, et comme généralités communes, nous conservent toutes les ressemblances qui nous rejoignent.

Tout homme ressemble donc à un autre, en ne ressemblant pourtant qu’à lui.

[…] Point d’homme enfin dont la formation commune et complète, de quelque étrange façon qu’elle soit, n’entraîne fortement ou faiblement en lui une possibilité, une disposition universelle d’être remué par tous les penchants qu’on voit dans les autres hommes.32

Eloïse Lièvre

Notes

1 .

« Si j’étais écrivain et mort, comme j’aimerais que ma vie se réduisît, par les soins d’un biographe amical et désinvolte, à quelques détails, à quelques goûts, à quelques inflexions, disons des « biographèmes » dont la distinction et la mobilité pourraient voyager hors de tout destin et venir toucher, à la manière des atomes épicuriens, quelque corps futur, promis à la même dispersion ; une vie « trouée », en somme. » (Roland Barthes, Sade, Fourier, Loyola, Œuvres complètes, édition établie et présentée par Éric Marty, Paris, Seuil, 1995-1996, tome III, p. 1045.)

2 .

Les premiers biographes de Marivaux, Lesbros de la Versane, d’Alembert faisaient cette confusion entre la vie et l’œuvre.

3 .

De monographie : « étude exhaustive portant sur un sujet précis et limité ou sur un personnage ». Cette analogie a la vertu de ne pas distinguer la vie et l’œuvre et de considérer réciproquement l’écriture comme un fait biographique et la vie comme une œuvre, car destinée à elle.

4 .

Jean Rousset, Forme et signification. Essai sur les structures littéraires de Corneille à Claudel, José Corti, Paris, 1966.

5 .

Voir Frédéric Deloffre, Une Préciosité nouvelle, Marivaux et le Marivaudage, Paris, Les Belles Lettres, 1955.

6 .

Roland Barthes, S/Z, Paris, éditions du Seuil, p. 75.

7 .

Voir notre analyse « L’embarras du choix : tension narrative et romans possibles dans La Vie de Marianne », Méthode !, Agrégations de lettres 2015, 2014, p. 155-161.

8 .

« Dans Le Paysan parvenu, tout se passe comme si Marivaux éprouvait la plus grande difficulté à renoncer à ce halo de possibles qui entoure tout roman, ou encore comme si un choix narratif inscrit dans le texte n’était jamais définitif. Mme de Fécour mourante est toujours susceptible, on le sait, de ressusciter, et le maître parisien dont la mort subite précipite la faillite est un moment après allégué comme l’exemple même du financier «mort riche comme un coffre». » (Marc Escola, « Nouveaux regards sur le Paysan Parvenu », Revue Marivaux, 6, daté 1997, paru en décembre 1998, p. 43-54.)

9 . Pharsamon ou les Nouvelles Folies romanesques, Œuvres de jeunesse, Gallimard, bibliothèque de la Pléiade, p. 457.
10 . Ibid., p. 541.
11 .

La Voiture embourbée, Œuvres de jeunesse, édition citée, p. 346.

12 .

Pain béni qui fait le délice de Marivaux le premier : « […] mais franchement, avant que je commence, que quelqu’un fasse le reste du chemin pour arriver à la fin de l’histoire, car j’avoue que je suis embourbée. » (La Voiture embourbée, Œuvres de jeunesse, p. 370-371.)

13 . La Voiture embourbée, Œuvres de jeunesse, édition citée, p. 352.
14 .

Voir Marc Escola, article cité.

15 . Le Legs, scène X, Théâtre complet, tome II, Éditions Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, p. 316-321.
16 . Ibid, scène II : Hortense :« […] du caractère dont ils sont, ils auront de la peine à s’en parler. » ; scène III : L’Épine : « Le Marquis, homme tout simple, peu hasardeux dans le discours, n’osera jamais aventurer la déclaration. » ; scène IV : « Je n’ai pas trop le talent de parler d’amour. » ; scène XII : La Comtesse : « Vous ne comptez pas assez sur vos amis, Marquis ; vous êtes trop réservé avec eux. », le Marquis : « Oui, j’ai beaucoup de timidité ».
17 .

Mathieu Brunet, « Ne dites pas “je vous aime” ! Périphrases de l’amour dans le théâtre de Marivaux », dans Jean-Christophe Cavallin et Jean-Damien Mazaré (dir.), Le Mot propre et la périphrase. Du tour précieux à « l’objet tu », Paris, Classiques Garnier, coll. «Rencontres», 70, 2014, p. 243 et suiv.

18 .

Michel Charles, Introduction à l’étude des textes, Seuil, Collection Poétique, 1995.

19 .

Jean-Paul Sermain, Marivaux et la mise en scène, Éditions Desjonquères, 2014.

20 .

Marivaux, Le Spectateur français, Journaux et Œuvres diverses, Édition de F. Deloffre et M. Gilot, Paris, Bordas, 1988, cinquième feuille, p. 137.

21 .

De la même façon, dans la vingt-et-unième feuille, il choisit de ne rapporter qu’une partie de la lettre qui accompagne le manuscrit de l’inconnu, Ibid., p. 233.

22 . Ibid., quatrième feuille, p. 132.
23 .

Pourra l’être, mais par d’autres que Marivaux, comme Mme Riccoboni qui écrit en 1761 une Suite de la Vie de Marianne.

24 .

Dans le deuxième acte de La Surprise de l’amour par exemple, il est question d’une boîte ornée de diamants contenant le portrait de la Comtesse et que Colombine aurait perdue. Mais on n’a pas lu ou vu Colombine perdre la boîte. Le texte est ici « troué » et de ce trou naisse les fantômes, ces hypothèses qui constituent aussi bien le texte que les dialogues : Colombine a-t-elle véritablement perdu la boîte ? Arlequin l’a-t-il véritablement trouvée ? Lélio a-t-il gardé le portrait qu’elle contenait ? Colombine a-t-elle subtilisé le portrait avant de faire trouver la boîte à Arlequin ?

L’idée de « trou dans le texte » est utilisé par R. Tomlinson dans « Amour et politique : modèles sémiotiques dans Le Prince travesti », L’Âge du théâtre en France, Academic Printing and Publications, Edmonton, 1988, p. 119-131.

25 . La Voiture embourbée, Œuvres de jeunesse, édition citée. p. 353.
26 .

Le Cabinet du Philosophe, Journaux et Œuvres diverses, édition citée, p. 437.

27 . Le Spectateur français, Journaux et Œuvres diverses, huitième feuille, édition citée, p. 150.
28 . L’Indigent philosophe, Journaux et Œuvres diverses, sixième feuille, édition citée, p. 312.
29 .

Apparemment seulement car par un jeu de pronoms personnels, Marivaux insinue une ambiguïté qui exprime la gêne de l’énonciateur lui-même à se situer parmi les beaux esprits : « Nous parlions l’autre jour de l’amour-propre de l’auteur excellent ou supérieur ; et je vous dis là-dessus, madame, que cet auteur savait ses avantages ; qu’il se disait : je connais ma supériorité, cela est doux, mais il me revient encore un plaisir bien flatteur à prendre ; c’est de voir les autres la connaître avec moi. » (Lettres sur les habitants de Paris, Journaux et Œuvres diverses, édition citée, p. 36.)

30 .

Ce porte-à-faux dû à une disparité entre la famille brillante de sa mère, sœur d’un architecte du roi, et celle du père, modeste provincial d’adoption qui restait étranger dans sa province, est suggéré par les biographies de Marivaux présentes dans les grandes études sur Marivaux au XXe siècle, de Henri Coulet et Michel Gilot, Marivaux, un humanisme expérimental, Paris, Librairie Larousse, 1973, de Henri Coulet, Marivaux romancier. Essai sur l’esprit et le cœur dans les romans de Marivaux, Paris, Armand Colin, 1975 et de Michel Gilot, Les Journaux de Marivaux. Itinéraire moral et accomplissement esthétique, Librairie Honoré Champion, 1975.

31 .

Voir Sylvie Dervaux, « La chambre d’enchantement : Le Bilboquet de Marivaux (1714) », Studies on Voltaire and the Eighteenth Century, n°323, Oxford, Voltaire Foundation, 1994, p. 247-269.

32 . Réflexions sur l'esprit humain à l'occasion de Corneille et de Racine, Journaux et Œuvres diverses, édition citée, p. 483-484.
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